COMPTE-RENDU DE LA 24ème CONFERENCE INTERNATIONALE DE LA SPR

Université de Northampton

8-10 septembre 2000

par Alex Sabell et Elizabeth Roboul

(traduction P. Catala)

RESUME :

Lors du 24ème congrès annuel de la SPR en septembre 2000, un point fut fait sur la situation de la recherche en parapsychologie en Angleterre. Cette situation paraît bonne. A l'Université de Northampton, le département de psychologie soutient les recherches en parapsychologie. Des subventions de recherches ont été obtenues. Un module de parapsychologie a été intégré dans le cursus de psychologie.

De nombreux exposés ont été présentés, sur des sujets divers et avec des optiques très variées. Certains concernaient des expérimentations "classiques" de laboratoire, sur la vision à distance, le ganzfeld, le DMILS … D'autres présentaient des études de cas spontanés ou de sujets (poltergeist, clairvoyance, "possession" …). Certaines études expérimentales étaient surtout des études psychologiques (associations d'idées, faux souvenirs, types de personnalités pathologiques, suggestibilité et manipulation des témoins, techniques des médiums pour deviner, paralysies du sommeil etc…). Des discussions ont été menées sur l'utilisaion de l'instrumentation, et l'étude des traces physiques permanentes du psi ("objets paranormaux permanents"). Des études plus axées histoire des sciences ou sociologie ont abordé des sujets comme le scepticisme à l'égard de Home, ou les sabbats de sorcellerie. Une expérience a été faite pour relier expérimentation de laboratoire et action sur le terrain (bio-PK). Enfin, quelques communications sont revenues sur le problème de la survie, qui était fondamental lors de la création de la SPR (en particulier les correspondances croisées furent évoquées).

L'ambiance du congrés était bonne, avec la présence à la fois de nombreux jeunes et d'anciens de la SPR. La pluralité de vues de la SPR a été mis en exergue par le président.

Ont été regrettés le départ de Susan Blackmore, et le décès prématuré de Arthur Ellison, figure de la SPR.

 

Le charme unique de la petite cité de Northampton a été la toile de fond du congrès annuel de la SPR. Bien qu'en léger contraste, le campus moderne de l'Université de Northampton a réussi à imposer un sentiment d'optimisme tourné vers le futur concernant la situation actuelle de la parapsychologie au Royaume-Uni. Un département de Psychologie très actif apporte un grand soutien au Professeur Deborah Delanoy, au Docteur Chris Roe, et à Simon Sherwood dans leurs "recherches psychiques" (parapsychologie). Plus encore, un module de parapsychologie pour les étudiants en psychologie, et de nombreux chercheurs diplômés ou en préparation de diplôme universitaire, nous assurent que la situation semble très prometteuse dans les Midlands de l'Est. De plus, une subvention Perrott-Warrick a été donnée à l'Unité pour les trois prochaines années, garantissant une expansion officielle future.

En parcourant la scène du congrès, il nous semblait rafraîchissant de voir un mélange vibrant de participants jeunes et d'autres plus matures. Il était également de bon augure que cette année ait été réalisé un recoupement des expériences de laboratoire et des travaux de terrain. Par ex., la réévaluation des Correspondances Croisées par Matt Colborn et Matt Smith et l'étude de médium par Roy-Robertson, toutes deux détaillées ci-dessous. Sur une note moins gaie cependant, nous avons tous été attristés par le décès prématuré de Arthur Ellison, une présence inestimable pour la SPR durant de nombreuses années.

C'est dans ce cadre que Donald West a pu introduire les premières conférences SPR du millénium. En nous accueillent il nous expliqua que les articles discutés ne seraient pas cette année répartis en sessions différentes selon le sujet. Cette option avait été jugé favorable à ceux qui avaient une large variété d'intérêts. Il a noté également que Northampton n'avait jamais été le siège du congrès SPR auparavant, et que cette nouveauté reflétait la tendance de ce site à devenir un centre important pour la parapsychologie.

En tant que premier orateur, Pete Lamont choisit de parler de l'histoire sociale de la science conventionnelle et de ses réactions aux séances de Home. Cela nous permit de considérer le scepticisme irrationnel dans un contexte historique, en exposant la facilité avec laquelle la Science a pu récuser des demandes pour lesquelles elle n'avait pas de réponse toute prête.

Matt Smith a discuté une investigation dans laquelle il s'est engagé avec Donald West. Ils ont été contactés pour visionner une bande vidéo provenant d'une caméra d'un circuit fermé de TV, ce film comportant l'image d'un homme censé être un fantôme. Matt a donné les détails de l'enquête et discuté la possibilité que l'image ait été causée par des moyens conventionnels. Il conclut qu'il semblait y avoir une explication conventionnelle (non-paranormale) assez satisfaisante, mais qu'il demandait au public d'apporter les idées qu'il pourrait avoir sur le sujet.

Ciaran O'Keeffe discuta une étude examinant la structure des tactiques de suppositions (cold reading) utilisées par les "détectives psychiques". Il avança l'idée que certains détectives psychiques utilisaient de telles tactiques de manière à amener l'interlocuteur à attribuer une interprétation personnelle à une information ambiguë. Son sentiment était que cette activité séduisante pouvait expliquer pourquoi les forces de police continuent d'utiliser des détectives psychiques en dépit de leur manque apparent de succès objectifs.

Puis John Randall consacra un moment à la médiumnité de Stella Cranshaw. En appliquant des méthodes statistiques modernes, il a découvert que durant les séances, la température changeait, et que la répartition des sexes au sein des participants était corrélée significativement avec le niveau général d'activité paranormale.

Julie Rousseau, partenaire du formidable C-FAR, a émis de fortes réserves à l'égard de l'utilisation d'"objets paranormaux permanents" comme cibles d'expériences paranormales. Elle fit remarquer que nous devrions être très prudents quant aux attentes que nous avons à propos de ces objets, et donc en distinguant entre visions mondiales paranormales et non-paranormales.

Ensuite vint un compte-rendu de l'étude de médiums de Robertson-Roy, donné par les auteurs. Un strict protocole de double-aveugle a été conçu pour essayer de démontrer que les assertions des médiums sont beaucoup plus en rapport avec les sujets désignés qu'avec les autres personnes présentes. Des contrôles ont été mis en place pour éviter les indices sensoriels involontaires (ou autres) qui pourraient être donnés au médium. Les résultats semblent prometteurs et une publication est en cours.

Enfin, Melvyn Willin discuta les idées fausses que la société tend à rattacher à la sorcellerie. Il donna un compte-rendu personnel des activités actuelles d'un sabbat de sorcières, qui consiste seulement partiellement en rituels et jets de sorts. Cependant, ce sont dans ces activités que les indices de phénomènes paranormaux peuvent résider.

Guy Lyon Playfair attaqua le problème de la découverte d'un "objet paranormal permanent". Avec cette idée en tête, il introduisit la roue "Egely". L'inventeur, George Egely, soutient que cette invention mesure légitimement la "vitalité". Puis Guy parla d'une épaisse clé anglaise que Uri Geller aurait tordue durant une visite à une équipe de Formule1. Il réaffirma sa position qui est que l'objet n'aurait pas pu être manipulé par des moyens normaux.

Maurice Grosse clôtura le premier jour dans son style propre, captivant son auditoire en montrant une vidéo sur une enquête de Mary Rose Barrington et lui-même à propos de raps (coups frappés) autour d'un garçon de 7 ans. Les coups étaient objectivables et arrivaient surtout quand l'enfant était dans sa chambre, prêt à se coucher. Ceci a été enregistré sur bande vidéo et observé par les deux investigateurs qui admirent que l'activité observée était inexplicable.

L'ambiance du congrès était bonne et nous avons même eu une équipe de cinéma qui filmait en préparation d'un documentaire scientifique.

Le samedi matin, Mary Rose Barrington ouvrit la séance par une relation du cas Iris (Hongroise) / Lucia (Espagnole). Ce cas intrigant concerne un jeune hongroise qui fut "possédée" par une entité identifiée comme une femme de ménage espagnole appelée Lucia. Plusieurs éléments de preuve se concentrent sur le fait que la jeune fille parlait couramment espagnol - une langue dont elle n'avait pas connaissance ordinairement.

David Fontana poursuivit par une conférence sur la récente renaissance des études sur la survie. Il mit en valeur des interviews qui sont suggestifs de l'après-vie. Il parla également de l'appui du "Survival Committee" de la SPR, et de son récent support financier pour les études sur le "psychomanteum" qui vont être entreprises à l'Université de Northampton.

Les suites du cas "Scole" furent ensuite discutées. Montague Keen, ardent défenseur de la paranormalité du cas Scole, mentionna de récents développements et preuves. Il avança que le cas est renforcé par l'absence de preuves de fraudes. Des comparaisons furent faites avec de précédentes études.

Deborah Delanoy parla d'une étude DMILS effectuée à Edimbourg par les chercheurs Claire Brady et Alison Roe. L'étude montre que le fait de s'attendre à être regardé influence la sensibilité au regard de l'autre.

Le nouveau dispositif de Ganzfeld numérique à Liverpool fut l'objet de la conférence suivante, présentée par Jezz Fox. La procédure Ganzfeld est très importante dans les expériences de parapsychologie, et on espère que l'utilisation du DVD va beaucoup augmenter la facilité d'utilisation et la rigueur des dispositifs.

Ensuite Vic Tandy fit état d'une utilisation d'un infrason de 19 Hz dans une affaire de hantise. Dans une cave située au-dessous de l'office de tourisme de Coventry, il a réussi à localiser précisément l'emplacement d'une hantise en utilisant seulement un dispositif de détection à infrasons. Un travail ultérieur est envisagé, qui tirerait parti de cet outil sous-estimé et pourtant précieux.

En contraste, Tony Cornell avertit le public des problèmes d'instrumentation dans les cas spontanés. Au cours des vingt dernières années, des instruments comme des caméras infrarouges ou des capteurs thermiques ou électriques n'ont pas apporté de preuves significatives. Il a discuté des controverses (pro/anti) sur les instruments actuels et des problèmes possibles qui pourraient les affecter, comme l'effet d'expérimentateur.

Stuart Wilson, Bob Morris et Eric Pronto ont étudié l'association d'idée en tant que véhicule pour la détection du psi inconscient. Ils essaient de vérifier certaines idées de Rex Stanford et de démêler les différents facteurs en jeu. Un des résultats a révélé un effet d'expérimentateur et on pense que les biais des réponses pourraient être la cible des prochaines explorations.

Emma Greening fit un intéressant rapport sur sa dernière étude d'une série d'exploration de diverses variables associées avec la production et le stockage des "faux souvenirs". Elle a trouvé dans cette étude que la croyance au paranormal était corrélée avec la vividité de l'imagerie visuelle, et elle veut maintenant examiner les aspects plus qualitatifs des faux souvenirs.

Chris Roe a présenté une étude conduite sous sa supervision par Stuart Flint : une expérience de vision à distance qui utilise un Ganzfeld comme inducteur. Il a affirmé qu'il y avait des indices suggérant qu'une induction Ganzfeld, dont le but est de produire des états modifiés de conscience, puisse induire du psi. Après avoir donné des détails complets sur le protocole et la procédure, il donna finalement les résultats de l'étude, qui étaient statistiquement très significatifs.

Ensuite, Matt Colborn donna une présentation approfondie d'un article sur lequel il a travaillé avec Matthew Smith, qui réévaluait certaines des "correspondances croisées" rapportées entre 1901 et 1930. Comme de nombreux lecteurs le savent, celles-ci étaient dignes d'attention car les messages produits par les médiums étaient censés provenir de membres décédés de la SPR, et étaient présentés aux différents médium d'une manière telle qu'ils ne devenaient intelligibles que quand les transcriptions des différents médiums étaient réunies. Ces correspondances croisées étaient considérées comme des preuves fortes de la survivance après la mort. Matt fit remarquer que l'article était une première tentative pour voir si on pouvait raisonnablement exclure la fraude et rendre le matériel plus accessible aux évaluations modernes.

La parapsychologie fut ramenée dans notre vie quotidienne par Serena Roney-Dougal. Elle présenta une étude pilote concernant la démarche précieuse de prendre une expérience de laboratoire de base et de la replacer dans le monde réel. Cela consistait à comparer la croissance de deux groupes de graines de laitue d'une ferme biologique. Un des groupes serait "accéléré" par un guérisseur, l'autre non. Serena conclut qu'essayer d'amener le travail de labo sur le terrain était essentiel mais très difficile.

La dernière conférence de la journée était celle de Nick Rose qui discuta l'étude qu'il avait conduite avec Sue Blackmore, concernant un homme qui pensait avoir des facultés psi. Ils ont travaillé ensemble pour produire une série d'expériences qui seraient saines sur le plan méthodologique, mais pourtant reflèterait encore la faculté qu'il revendiquait : par ex., essayer de deviner la couleur d'une carte, ou prédire le gagnant d'une course de chevaux simulée. Bien que dans ce cas le psi n'ait pas été démontré, les résultats du sujet se sont graduellement élevés vers le niveau de signification.

Après le repas, Bernard Carr s'adressa à toute l'assemblée, pour parler de sa vision de la SPR, qui établissait un équilibre entre les différentes polarités de la recherche psychique. Son sentiment était que cette diversité d'opinion au sein de la Société devait constituer une force, et ne pas être vue comme une énergie destructive tirant dans différentes directions. Une version de cette allocution a paru dans la dernière édition de "The Paranormal Review".

Un fête d'adieu fut donnée à Sue Blackmore, qui a dansé avec enthousiasme avec Bernard Carr.

Le dimanche matin, Christine Simmons commença la session avec sa recherche de PhD. Elle s'y est concentrée sur les relations possibles entre certains types de personnalités (utilisant particulièrement des tests mesurant la schizophrénie) et les expériences paranormales (anomales), y compris les performances objectives dans des expériences de laboratoire. D'une façon complexe, ses résultats semblent attirer l'attention sur le fait qu'il y a nécessité d'examiner les expériences paranormales subjectives, et la façon dont elles sont liées avec la personnalité.

Puis David Rousseau présenta une taxinomie innovante et passionnante pour classifier les phénomènes "anomaux". Il suggérait que nous pourrions prendre les cas spontanés traditionnels et les représenter comme des combinaisons d'anomalies exceptionnelles du type de celles étudiées en laboratoires. Il pensait que cela pourrait aider à justifier les deux classes de terminologie dans l'usage quotidien et à démontrer leur valeur.

Paul Steven a donné un nouvel éclairage au sujet ancien de la macro-PK opposée au micro-PK. Il a discuté le fait que les deux soient considérés comme des phénomènes proches mais observés et étudiés de façons complètement différentes. Paul croit qu'on devrait être prudent quant à dire qu'ils sont apparentés. Il pense que jusqu'à ce qu'on ait trouvé une preuve d'un mécanisme d'unification, la micro-PK ne peut pas prouver la macro-PK et vise versa.

La dernière incarnation de Richard Wiseman a été celle d'un "chasseur de fantômes" (ghost-buster". Dans un voyage largement médiatisé à Hampton Court, lui-même et son équipe de chercheurs Caroline Watt et Ciaran O'Keeffe ont mené une investigation au sein d'expériences inhabituelles dans le palais. A travers la suggestion, il a été possible de manipuler les expériences que les gens rapportaient.

L'approche systématique de l'investigation de la télépathie fut le sujet de la présentation de Jezz Fox. Il concernait la notion ancienne que les croyances des gens peuvent avoir un effet sur les capacités et les résultats expérimentaux. Il dit que cette information peut être cruciale lors de la recherche de télépathie. Il conclut en disant que les recherches ganzfeld futures devraient intégrer les interviews sur les attitudes des participants avant et après la session pour voir si elles ont des effets sur les résultats.

Finalement, Nicolas Rose parla du sujet de paralysie du sommeil. C'est une expérience effrayante dans laquelle le sujet est incapable de bouger lors de la transition sommeil/veille. Dans une étude pilote, il a trouvé que 40% des sondés disaient avoir expérimenté la paralysie du sommeil. Les effets associés usuels incluent les "faux réveils", sensation de présence dans la pièce, peur ou douleur soudaine. Nick a aussi trouvé une corrélation positive distincte entre l'interprétation paranormale de la paralysie du sommeil et les scores des sujets sur l'échelle "Revised Paranormal Belief Scale" qu'il avait utilisé dans son étude.

En clôture les remerciements furent faits par Bernard Carr.

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