RAPIDE COMPTE-RENDU DU SYMPOSIUM CENCES

Par Pascale Catala

décembre 2000

 

En novembre 2000 s'est tenu à Paris le premier symposium du CENCES sur le thème : "Les Mythes et le paranormal", réunissant une vingtaine d'intervenants de disciplines diverses (anthropologie, parapsychologie, sociologie, journalisme, psychologie, etc.). Autour de diverses tables rondes, chacun a pu présenter brièvement ses propres travaux ou problématiques.

Contrairement à ce que l'on pouvait attendre par rapport à un sujet aussi "sensible", il y a eu peu de confrontations ou polémiques. Non pas que tous les acteurs aient été d'accord sur tous les plans, loin s'en faut, mais le but du symposium étant avant tout la communication au public de l'état des lieux des recherches en ce domaine, les débats d'opinion ont été peu approfondis.

Au niveau de la communication au public, il me semble que le symposium a atteint complètement son objectif : informer, le plus honnêtement possible, sur l'état de la recherche sur le paranormal, en France et à l'étranger. L'assistance était bien fournie, il y a eu à la fois des récits de cas basés sur des témoignages et la présentation de résultats d'expériences ou de réflexions de nombreux organismes : SRI, NISC, COMETA, IMI, GEPA, GEPAN, GERP ...

Ont été cités les centres de recherches actuels qui semblent les plus importants, à Freiburg, Edimbourg, Utrecht, Las Vegas ...

Le deuxième rôle que me semble avoir joué ce symposium est celui de "rassembleur". En effet, depuis une dizaine d'années la recherche sur le paranormal en France jouait les "Belle-au-bois-dormant", parce que les acteurs y étaient très dispersés ou plutôt inactifs. Bien sûr, certains individus continuent à fournir un travail considérable (voir par ex. ouvrages de B. Meheust), ou certains groupes spécialisés déploient des efforts bien méritoires (par ex. IANDS), mais il manquait une certaine "dynamique d'ensemble", dynamique qui a été réamorcée l'année dernière par la rencontre de la Sorbonne organisée par G. Gutierez, et cette année par ce symposium ainsi que par la renaissance de l'IMI (Institut Métapsychique International). Lors du symposium du CENCES, les nombreux invités ont eu l'occasion de comparer leurs stratégies, leurs approches respectives, et pourquoi pas ont pu élaborer des projets de collaboration, ce qui ne peut qu'encourager la créativité. Le CENCES a commencé a remplir ici son deuxième objectif, et il faut remercier Eric Raulet d'avoir réussi, par son courage, sa ténacité, et ses qualités de communication, à mener à bien cette action.

Sur le plan des résultats de la recherche en France, le tableau a été moins réjouissant. Yves Lignon a même surpris en citant une phrase de la plus haute humilité : "Jusqu'ici nous avons ramassé des cailloux au pied de la montagnes ; nous savons tout de ces cailloux mais rien de la montagne." (Heureusement que René Péoc'h est là pour remonter le moral des troupes avec ses expériences de PK et rétro-PK systématiquement reproductibles!). La dernière table ronde, qui posait la question : "le paranormal peut-il révolutionner la connaissance ?" a permis de différencier les intervenants selon leur niveau d'optimisme. Certains croient à l'avenir, à l'utilité de la recherche scientifique sur le paranormal, et à des découvertes proches (Hardy, Péoc'h, Staune ...) , d'autres non (Van Cauwelaert), d'autres enfin pensent qu'il faudra faire un détour par d'autres sciences (Vallée, Varvoglis ...) , remettre en cause nos conceptions sur la Science et s'obliger à une réflexion épistémologique (Louys, Boccara, Rabeyron ...).

Petit survol du contenu des tables rondes :

Dans la première table ronde, les intervenants ont rappelé que la notion de mythe n'était pas aussi évidente qu'on pourrait le penser, en insistant sur les variations ethno-culturelles, puis ils ont présenté différentes actions de recherches, actuelles et passées, dans le domaine du paranormal.

Dans les interventions consacrées à la presse, J.Y Casgha et Marc Menant ont soulevé les difficultés à donner de l'information de qualité dans ce domaine.

La table ronde sur les NDE a surtout évoqué des expériences vécues et les répercussions psychologiques qu'elles pouvaient avoir sur des destinées individuelles.

Dans la table ronde sur les OVNIS, les différentes hypothèses explicatives ont été évoquées, ainsi que les problématiques épistémologiques.

Lors de la table ronde sur la parapsychologie, des résultats encourageants ont été présentés par Mario Varvoglis, mais il a été évoqué beaucoup de phénomènes de résistance au développement de la parapsychologie scientifique. Il y a même eu quelques remous provoqués par des sceptiques dans l'assistance, mais rien de bien virulent. A la fin du symposium nous avons même eu la surprise de voir tenants et sceptiques communiquer ensemble en aparté.

Le point théorique qui me semble ressortir de ce symposium est l'importance des processus inconscients dans la parapsychologie (Si Ahmed, Louys, Varvoglis ...). Bien sûr, rien de nouveau sous le soleil, cependant il est bon de se remémorer cette idée avant de se lancer dans des expérimentations uniquement inspirées de la méthodologie béhavioriste américaine, sous peine ... de continuer très longtemps à compter les cailloux tombés au pied de la montagne ...!

 

Au cours de ces débats, l'utilité de la recherche dans les domaines du paranormal a été évoquée ça et là, mais finalement assez peu (projet Stargate, psychothérapie par les techniques de transe (Si Ahmed) ...). En définitive, ce qui est le plus motivant pour un chercheur dans ce domaine, c'est au niveau de la recherche fondamentale, l'apport possible sur le plan de la connaissance de l'homme, du rapport esprit/matière, de notre conception de la méthodologie scientifique. C'est aussi le goût du mystère et des énigmes scientifiques (Vallée), qui peut être considéré péjorativement par certains (sceptiques, F. Favre ...), mais reste néanmoins un ressort important de la motivation de tout scientifique.

Enfin, je retiendrai surtout dans le dernier exposé de Paul-Louis Rabeyron, l'incitation à l'échange pluridisciplinaire, à une approche que je qualifierais d'"intégrative" qui prendrait en compte les différentes visions du monde ("matérialiste objectiviste, matérialiste subjectiviste, spiritualiste occultiste, spiritualiste mystique" ...). Ces différentes visions produisent nos "mythes", divers et variés, sur lesquels il est toujours intéressant de réfléchir, pour pouvoir remettre en cause nos modèles de pensée. Et c'est peut-être cela la plus grande richesse du paranormal, qu'"il interpelle en nous chaque mode de connaissance du monde".