Philippe GARNIER

 

 

 

 

 

Riom, le 9-11-2002

M. Favre,

 

Je m'intéresse à la parapsychologique depuis un an et demi. J'ai envie de m'y intéresser encore plus, en faisant, d'une manière ou d'une autre, des recherches dans ce domaine. J'ai consulté quelques livres et sites Internet sur le sujet, dont celui du Gerp. J'ai posé par mail quelques questions au site Gerp. Pascale Catala a répondu à certaines et m'a envoyé sur vous pour d'autres. Je me permets donc de vous les soumettre en résumant ce que je crois avoir compris de votre pensée (merci de me corriger quand l'interprétation est erronée).

1 et 2. Il y a des expériences en laboratoire qui se font, notamment aux Etats-Unis, pour prouver le psi, obtenir une certaine reproductibilité et voir quelles sont les conditions favorables à l'émergence du psi (EMC, etc.). Vous êtes très critique envers cette démarche. Vous pensez que chaque expérience, même donnant des résultats statistiques probants, est simplement équivalente à un événement psi spontané, qu'il est illusoire de croire que l'expérience est reproductible. Malgré tout, pensez-vous que certaines de ces expériences soient utiles ?

Ne prouvent-elles pas l'existence du psi aux yeux du public (qui a plus confiance dans des résultats de labo que dans le témoignage de M. Truc qui dit qu'il lui est arrivé tel phénomène) ? Sans être vraiment reproductible, ne pensez-vous pas qu'on puisse trouver des conditions où le psi se manifeste plus volontiers (EMC) et ainsi imaginer que le psi puisse s'apprendre ?

3. Vous opposez rituel à technique. J'aurais tendance, avec vous, à penser que le psi ne peut se reproduire de manière systématique (technique). Mais ne peut-on pas affiner un rituel qui permettrait de développer plus ou moins des facultés psi ?

4. Vous dites, je crois, dans un de vos articles, que vous aviez vous-même produit des phénomènes psi. Quel genre de phénomènes ? Faites-vous d'une manière ou d'une autre, de l'expérimentation ? Avez-vous en tête des expérimentations (nécessitant ou non du matériel) qui permettraient de trancher certaines questions théoriques ?

5 et 6. Votre expérience de référence est celle de Libet. J'ai peur de ne pas avoir très bien compris l'expérience. Un sujet décide quand il le veut de faire un geste, et on voit par imagerie cérébrale ce qu'il se passe dans son cerveau. Au moment où il décide de faire le geste (à t0), on voit une activité cérébrale dans l'aire motrice. A t0 + a, il fait son geste. Jusque-là, tout est normal. Or, à t0 – b, il apparaît une activité cérébrale dans cette aire. D'où la conclusion : il se passe quelque chose dans le cerveau avant que le sujet décide de lever le bras.

Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi on identifie à t0 le moment où le sujet décide de lever le bras. Comment peut-on objectivement (de l'extérieur) savoir quand le sujet décide de lever le bras ? Pourquoi ne serait-ce pas à t0 – b qu'il prend sa décision ?

Ensuite, vous dites que certains scientifiques affirment qu'à t0 – b il y a une cause inconsciente qui entraîne la cause consciente à t0. Vous critiquez cette approche en disant qu'elle nie le libre arbitre et que, sans libre arbitre, les raisonnements ne valent rien, y compris ce dernier. Mais ne peut-il y avoir de libre arbitre inconscient, i.e. quand je choisis inconsciemment de lever le bras ? Reste à définir ce je… Comment définissez-vous le je conscient : est-ce notre monologue intérieur, l'ensemble des images, sensations et paroles qu'on peut répéter à quelqu'un ?

Dans mon expérience personnelle, il arrive que je me gratte la tête et que je ne m'en rende compte qu'après. De même, n'est-il pas possible, pour le geste volontaire, que je décide d'abord inconsciemment de le lever et que ce soit un peu après que j'en prenne conscience, c'est-à-dire que je me dise dans ma tête : "Allez, je le lève !" ?

Bref, il me semble que mon inconscient peut avoir une finalité (ici, me soulager au niveau de la tête qui me démange) et que la prise de conscience ne se fasse qu'après. D'où deux traces cérébrales l'une après l'autre, sans pour autant renoncer à la finalité. Sinon, je n'ai rien contre l'explication rétro-PK.

7. Vous réduisez l'ensemble des phénomènes psi à deux phénomènes : le rétro-PK et l'auto-prémonition. Et, de plus, des événements non psi (selon les critères habituels, pas les vôtres) se ramèneraient à cette théorisation, comme les souvenirs ordinaires. Pourriez-vous, le plus simplement possible, expliquer à partir de votre théorie les phénomènes suivants :

– un homme meurt dans un accident de voiture et, au même moment, sa femme qui est ailleurs ressent une grande angoisse et voit son mari mort ;

– les résultats des expériences en labo d'auto-ganzfeld, qui donnent des résultats autour de 30 % au lieu de 25 ;

– un médium fait apparaître un troisième bras provenant de son corps, dans des conditions de contrôle très strictes.

8. Vous pensez que certains faits psi sont presque impossibles comme "décrocher la lune", même pour le plus grand médium du monde, parce que les autres terriens font un contre-PK inconscient. La lune fait-elle aussi du contre-PK (ma question est sérieuse, vu votre conception animiste ) ?

9. Est-ce que le monde objectif est la résultante des "luttes" entre les différentes subjectivités, un compromis, chaque sujet faisant son PK contré par d'autres ?

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Bon, voilà un premier jet de questions. En remerciant d'y répondre, je vous adresse mes cordiales salutations.

 

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François FAVRE

 

 

 

Saint-Denis, le 29 novembre 2002

Cher monsieur,

Merci de l'intérêt que vous portez au Gerp, particulièrement à mes travaux, et pour les excellentes questions que vous posez, trop vastes cependant pour leur donner des réponses complètes. Voici donc des ébauches de réponses, que je serai tout prêt à préciser dans le sens que vous souhaiteriez. Ces questions sont celles d'un parapsychologue en puissance, d'un véritable, ce qui est rarissime. Je vous encourage donc vivement dans cette voie. Votre tête me semble très bien faite.

 

1. L'expérimentation est utile quand elle fournit des informations nouvelles sur certains événements psi complexes peu connus. Mais en existe-t-il encore ? Nous savons par exemple tout ce qu'il est utile de savoir sur les apparitions, les poltergeists et les guérisons miraculeuses. Et il est parfaitement oiseux d'en apprendre plus sur les EMC, cette catégorie étant bien trop floue pour avoir une quelconque utilité scientifique. L'hypnose par contre circonscrit un domaine précis qu'on est encore très loin de comprendre ; mais là aussi, la documentation est complète, et même pléthorique. Le seul progrès ne pourra donc venir que de la théorie. Par ailleurs, la notion même d'expérimentation (objective) ne peut être pertinente en matière d'intentionnalité. Simple ou complexe, fréquent ou rare, le psi est toujours un processus intentionnel. Or l'intentionnalité – et c'est un point méthodologique crucial – ne peut être objet d'étude que si l'on en est soi-même le sujet.

C'est précisément ce que ne fait pas l'école rhinienne. Elle part d'une définition erronée du psi (événements non-causals disparates, alors qu'il s'agit d'événements anti-causals produits par des êtres actuels) et d'une conception de la recherche tout aussi erronée (étude des moyens de communication inconnus, alors qu'il s'agit d'une étude de la communion, dont l'expression relève des moyens de communication connus). Elle se donne des buts expérimentaux qui ne sont pas la théorie (cette école ne peut en avoir aucune digne de ce nom, je viens de dire pourquoi) mais la reproduction technique (impossible, puisqu'il s'agit de processus anticausals). Autrement dit, les rhiniens ne comprennent rien au psi mais croient qu'à force de faire ils finiront par comprendre ou, au moins, par réussir. Passons. Le béhaviorisme, qui croit fondamentalement qu'on peut penser sans penser, est assurément la philosophie scientifique la plus absurde qu'on puisse imaginer.

Il n'y a pas à trancher objectivement de questions théoriques : si vous ne croyez pas possible l'inversion temporelle, aucune expérience ne vous convaincra. Si vous ne croyez pas possible l'impossible, vous ne serez jamais parapsychologue et vous resterez métaphysiquement un sot, comme Freud, Changeux, Feynman ou Thom. Et, au sein même de la discipline, il faudrait, pour trancher, déjà une théorie reconnue. De rares chercheurs – comme vous – s'interrogent sur certains affirmations de la mienne, mais personne ne discute scientifiquement du mode de raisonnement qui la sous-tend et qui remet fondamentalement en cause les notions même d'expérimentation et de théorie telles qu'elles étaient jusqu'à présent entendues par la science. Ce n'est donc pas une expérience de type classique qui pourrait trancher de mon modèle, c'est au contraire mon modèle qui tranche de la pertinence expérimentale. Quant à des théories concurrentes, je n'en connais pas : aucune des théories avancées ne rend ou ne pourrait rendre compte de l'ensemble du psi.

 

2. Quel peut être l'intérêt scientifique de chercher à convaincre le public, ou même seulement un public scientifique ? Si un adulte n'aime ni Homère ni Mizoguchi ni Mahalia Jackson, je ne pourrai jamais y remédier : c'est trop tard. Par contre, je peux sensibiliser des enfants à l'art. Non en leur démontrant que seule la conquête de l'inutile peut donner un sens à la vie, mais en prenant moi-même de tels risques. Et il n'y a rien de plus malsain à mes yeux qu'un missionnaire quand il croit détenir des réponses formelles à des questions qui n'en ont pas. Il n'y a pas de recette pour donner du sens à son existence, pour créer, pour se trouver. Et vis-à-vis d'autrui, la seule chose que je puisse espérer est de constituer un exemple et/ou d'en trouver un chez lui. Malgré soi. L'abbé Pierre ne s'est pas occupé des exclus pour convaincre un public, mais parce qu'il ne pouvait faire autrement pour trouver son équilibre personnel et y aider les autres.

L'intérêt de la parapsychologie est d'aborder scientifiquement des domaines que la science avait jusque là négligés. Mais science ne veut pas dire reproductibilité, et encore moins rentabilité. C'est, profondément, une tentative de déterminer l'existant, de le rendre cohérent par une observation et une action réfléchies. La science peut s'appliquer à la matière ou à l'esprit, à soi ou à autrui, voire aux deux à la fois. C'est le cas de la parapsy, qui prétend étudier certaines interférences entre processus finals et causals. En quoi cela pourrait-il intéresser le public qui veut du merveilleux et n'aspire qu'à l'efficacité magique, ou les scientifiques qui fondent leur conception de la science sur la seule causalité ? Ces derniers nient, comme d'ailleurs tous les philosophes, que la science puisse accéder directement à des vérités métaphysiques. Or c'est précisément ce pari qui fonde la parapsychologie en tant que science. Faute de quoi, on devient l'agent d'une secte scientiste. Que font les rhiniens sinon enchâsser des reliques savantes qu'ils proposent à la dévotion des imbéciles ?

 

3. Peut-on apprendre la créativité ? Non, par définition. Et les rituels ne sont efficaces que chez des gens qui veulent déjà créer. C'est exactement comme les produits anti-tabac, qui ne fonctionnent que chez les personnes qui ont décidé d'arrêter de fumer. Le rituel scientiste (absorber des médicaments) n'est qu'un catalyseur, pas une cause. Chacun s'invente en fait le rituel qui lui convient, instituant ainsi un déterminant imaginaire : le créateur a besoin de croire à l'efficacité de son rituel pour créer. Globalement, il s'agit d'ambiance affective adéquate, d'écologie personnelle. Et c'est seulement cette globalité que le parapsychologue doit exprimer en termes scientifiques. Proposer des rituels, c'est faire œuvre religieuse, de fait anti-scientifique.

 

4. J'ai produit des ESP, des effets PK et des ectoplasmies. Mais ils ne m'intéressent absolument pas en tant qu'événements "objectifs". Seulement d'un point de vue personnel. Pourquoi se sont-ils produits alors que je ne les cherchais pas explicitement ? Comment se sont-ils inscrits dans mon destin en général, dans mon destin de parapsychologue en particulier ? Voilà les questions qui m'intéressent et auxquelles j'essaie de donner une réponse scientifique (valable pour autrui). Autrement dit, l'expérimentation n'est pas pour moi en marge de mon destin (c'est l'illusion objectiviste) mais s'inscrit au contraire en son cœur. Ce ne sont pas les acheteurs qui intéressaient Van Gogh, mais la peinture. Rimbaud n'a jamais écrit un poème pour faire œuvre immortelle, c'est la création même qui le motivait. Et, jusqu'à son dernier souffle, Einstein aura hurlé dans le désert contre les usages monstrueux de la science. La spécificité du parapsychologue n'est pas simplement de réfléchir sur ses propres actes créateurs mais d'en produire dont l'usage abusif soit impossible et de formuler le tout de façon déterministe.

Outre ces "impérimentations" philosophiques (de perior : tester), j'en fais de physiques, et depuis très longtemps, dans un domaine quasi inexploré : le fonctionnement propre de l'imaginaire. J'utilise pour cela mes rêves (on ne peut à cet effet utiliser ceux du voisin !). Il existe très peu d'études de ce genre et aucune théorie, bien sûr, qui les unifie. Ce travail se situe en amont de l'analyse symbolique, de l'herméneutique : comment et pourquoi se construit un rêve, le fait-on évoluer, nous résiste-t-il, s'interrompt-il ? Il s'agit donc de décrire les mondes virtuels avec les notions primitives d'espace, de temps et de matière que les physiciens utilisent pour la description dynamique du monde réel. Problème spécifiquement parapsychologique puisque le fonctionnement du rêve est entièrement "magique". Je ne me connais que deux précurseurs en ce domaine : Hervey de Saint-Denys, le premier (et toujours le seul) à avoir développé puis expérimenté sa lucidité onirique en tant que telle, et Bachelard pour ses rêveries méditatives sur la créativité et les quatre éléments. Je tiens ainsi un journal de rêves depuis mon adolescence. Cela m'avait aidé à constituer vers 25 ans un Moi définitif (à noyau infrangible) ; mais, depuis, je ne remplis ce journal que dans un but parapsychologique (péri-personnel). Avec l'espoir, entre autres, de rattraper la physique et de formuler l'imaginaire à partir d'une seule notion primitive : la matière-espace-temps.

 

5. "Faire tourner une table à distance ou déplacer volontairement sa propre main, c'est exactement le même problème scientifique." La remarque est de Gasparin, il y a un siècle et demi. Et c'est à Michel Duneau que le Gerp en dut l'exhumation, laquelle fit sur ma cervelle l'effet d'un électrochoc. Quel parapsychologue actuel s'intéresse au psi sous cet angle ? Aucun. D'où l'extrême importance que j'ai attaché à l'expérience du neurochirurgien américain Libet qui, devant le résultat stupéfiant obtenu et bien malgré lui, a soulevé quantitativement la question à l'intérieur du corps. La communauté scientifique a unanimement rejetée l'interprétation antitemporelle par simple aveuglement physique : "Le principe de causalité est absolu". Pétition de principe qui revient inconsciemment à nier toute validité scientifique à une expérience morale (fondée sur le principe de finalité). Et la communauté s'en justifie logiquement : "La modification du passé étant impossible (elle entraîne des paradoxes), toute interprétation de ce genre est une imposture scientifique." Refrain connu pour un parapsychologue. L'expérience de Libet étant très riche d'enseignements (elle a d'ailleurs été beaucoup discutée), cette lettre me paraît un bonne occasion d'en débattre en détail. Je vais donc m'étendre un peu, histoire aussi d'illustrer et de prouver ce que j'ai avancé précédemment.

A] D'abord une précision nécessaire, que vous me demandiez : c'est le sujet qui sait très exactement quand il décide d'agir immédiatement, car il regarde à cet effet une horloge munie d'un repère parcourant un grand cercle gradué en 2,5 secondes . Passons à la discussion elle-même : bien sûr, il peut y avoir eu décision inconsciente, mais le sujet affirme le contraire conformément au protocole prévu. C'est donc au scientifique à prouver que la décision est inconsciente. Il n'a certainement aucun droit – logique, moral ou métaphysique – de dire JE à la place du sujet. Or les matérialistes l'ont fait, selon le raisonnement suivant : puisque l'inversion temporelle est impossible, c'est donc forcément que la décision est inconsciente et antérieure. Mais ils ont été plus loin encore en concluant non que seules les décisions inconscientes sont libres mais qu'il n'y a jamais de décision libre. Je leur rétorque alors – vous y faites allusion – que cette conclusion infirme leur propos même. L'argumentation de ces scientifiques ne se limite donc pas à une pétition de principe, ils y ajoutent explicitement une absurdité morale. Performance rare, qu'il faut souligner : l'erreur est métaphysiquement complète.

Je pose le problème épistémologique de la manière suivante : peut-on définir physiquement le libre arbitre autrement que par une anticausalité ? Toute réponse oui est métaphysiquement absurde (elle est incompatible avec la survie du locuteur). Ma réponse, métaphysique et scientifique, est non. Pour moi donc, le problème est clos.

La pétition de principe que je signalais plus haut se retrouve dans toutes les sciences qui se réfèrent au réel. En sciences humaines, l'intentionnalité est le plus souvent définie en termes abusifs de conscience rationnelle de veille : "La fin détermine des moyens ultérieurs". Alors qu'en général une fin n'est subjectivement ni consciente ni rationnelle et qu'elle est toujours rétrodictive pour un tiers observateur (il ne repère et n'affirme une fin qu'en remontant hypothétiquement le temps : "Cet effet-ci ne peut s'expliquer que par une convergence intentionnelle de ces causes-là").

Vous admettez, contrairement au matérialiste ou au rationaliste, qu'une décision puisse être libre et inconsciente. Mais, vous aussi, vous appliquez aux effets d'une décision libre quelconque (consciente ou non) le principe de causalité. Vous vous grattez la tête inconsciemment. De quel droit pouvez-vous affirmer après coup : "J'avais pris inconsciemment ma décision avant de me gratter" ? Uniquement par analogie avec une décision consciente rationnelle. Ce n'est pas un raisonnement scientifique. Comment savez-vous que l'inconscient fonctionne de façon causale ? Vous n'en savez rien, vous devez donc le démontrer.

Mon argument à moi part d'une définition, que j'estime de simple bon sens : toute pensée, consciente ou non, consiste à se donner d'un point de vue objectif une fin ultérieure qui rétrodétermine des moyens antérieurs. Cette fin est absolue, ex nihilo : elle est libre et n'a donc pas de causes antérieures extérieures à elle-même. Si la pensée n'était pas anticausale, il n'y aurait non seulement pas de liberté effectrice, mais pas de pensée du tout. N'en déplaise aux idéalistes, une pensée en soi, un esprit en soi, Dieu a fortiori, n'a aucun sens métaphysique : un locuteur peut certes construire de tels concepts et les imaginer, mais il ne peut pas en vivre . A contrario, une science métaphysique, pour vivre, doit prohiber toute transcendance, tout déterminisme extramondain, tout postulat.

Par nature donc, pensée et monde objectif sont les reflets l'un de l'autre. Décider d'agir immédiatement, c'est objectiver sans raisonner le déterminisme même d'une pensée quelconque occupant l'esprit. La conséquence corporelle au niveau de l'aire motrice cérébrale est instantanée. Mais cette objectivation correspond seulement à la fin visée (agir immédiatement). Il faut en outre que des moyens subjectifs aient été mis en branle antérieurement, c'est-à-dire qu'il existe des causes cérébrales concourant à l'excitation de l'aire motrice. Ce raisonnement théorique revient à affirmer que toute décision d'agir immédiatement est nécessairement postérieure à sa première conséquence observable (est un rétro-PK). C'est très exactement et complètement ce que vérifie l'expérience de Libet.

Revenons à votre judicieux exemple du grattage et élargissons la perspective à propos d'inconscient. Eliminons d'abord une erreur commune : un geste involontaire n'est pas une geste sans volonté mais sans volonté consciente. Il n'y aurait sinon pas de geste du tout. On peut ensuite estimer que le fœtus invente le grattage lors des premières fois où il éprouve une démangeaison. Un réflexe s'installe ensuite. On se gratte donc souvent inconsciemment. Mais la relation alors entre démangeaison et grattage n'est certainement pas causale. La démangeaison est un affect désagréable dont la résolution, n'étant plus connue, nécessite de nouveau une invention. Le grattage ne peut être alors l'effet de la démangeaison ou d'une décision aléatoire. Il se produit pourtant immédiatement. Qu'est-ce à dire sinon qu'il existe une fonction 1) qui n'a rien à voir avec la connaissance rationnelle, la conscience et l'irréversibilité temporelle, 2) qui peut reproduire des inventions motrices ? Cette fonction, c'est la volonté. Conclusion pour notre "expérience de pensée" – que j'appelle une impérience : une décision inconsciente n'est pas une décision rationnelle dont on n'a pas conscience. Elle ne relève pas d'un principe déterministe temporel (causal ou final), mais spatial. Le problème se complique sérieusement !

Je viens de parler de psychophysiologie. Mais la même pétition de principe touchant la causalité se retrouve jusqu'en physique. Alors que l'inversion temporelle explique totalement l'existence et les propriétés des antiparticules (ce sont les particules déjà connues qui font un demi-tour temporel), les physiciens affirment qu'il ne s'agit là que d'une représentation commode, qu'elles se déplacent en fait du passé vers le futur. Cette pirouette intellectuelle sauve certes les principes indissociables de causalité et d'objectivité, mais on n'explique alors plus rien des antiparticules. Des critiques similaires pourraient être faites aux cosmologistes : on ne peut à la fois définir la causalité comme un postulat et raisonner en rétrodiction.

B] Arrivons-en maintenant au fond du débat, c'est-à-dire à la modélisation théorique en parapsychologie. Une action finalisée consiste à produire diverses causes qui vont engendrer un effet unique. En tant qu'observateur, vous pouvez très bien a posteriori décrire ce processus en termes de causalité ; mais cela constitue une fiction et non une réalité. Car vous ne pourrez jamais prévoir le moment, la forme et le but d'une action que je décide de rendre imprévisibles à vos yeux ; j'infirme donc réellement l'universalité de votre principe de causalité. On pourrait bien entendu faire la démonstration inverse pour le principe de finalité, toute signification (ici le déterminisme) étant constituée de deux complémentaires au moins. La parapsychologie, science de la métaphysique, ne peut exister qu'en partant de cette évidence première. Les sciences classiques, fondées sur le tiers exclu, n'existent qu'en s'y refusant.

Aussi, et je caricature pour me faire mieux comprendre, le causaliste strict ne s'embarrasse pas de psychologie morale et vous "explique", par exemple, qu'on mange tout simplement parce qu'on a faim. Pourquoi avait-on faim ? A cause d'une sécrétion gastrique. Mais pourquoi cette sécrétion gastrique ? Etc., jusqu'à la Cause première du monde. Et, là seulement, il la ferme. La véritable explication du processus est pourtant simple et évidente : on mange pour ne plus avoir faim. Ne plus avoir faim après manger est ce qui détermine diverses actions antérieures (acheter de la nourriture, préparer un plat, se mettre à table, etc.). Tout le monde comprend ça, et il n'y a là pas le moindre mystère. Or, traduite en termes parapsychologiques, la faim rentre alors dans la catégorie des auto-prémonitions courantes.

Ce processus, intentionnalité en moins, est depuis longtemps décrit en biologie : c'est ce qu'on appelle le feedback négatif, source de toute homéostasie. En physique classique, le temps était irréversible (causalité entropique, divergente) et l'espace réversible, mais tous deux étaient linéaires. Avec la rétroaction négative, le temps s'avère circulaire : l'objet revient à son état et à l'instant initiaux (le bilan informationnel est nul, l'objet n'a plus changé). A ces deux descriptions de l'observation (portant sur la réalité objective), on peut opposer deux descriptions symétriques de l'imagination (portant sur des virtualités subjectives, des fictions). L'une, antiphysique : le temps est réversible (le sujet doit le créer en parcourant ses dimensions en tout sens), mais l'espace irréversible (il doit le créer en parcourant une seule direction sémantique pour constituer un "récit sensé" ). L'autre, psychologique : en rendant l'espace circulaire, le sujet s'oblige à revenir à sa tendance et au point initiaux (à rendre nul le bilan intentionnel, à effacer sa fiction pour pouvoir en dessiner une autre).

Le problème du parapsychologue théoricien est alors de concilier harmonieusement ces déterminations contradictoires. Mon modèle du circuit psi est une solution minimale à ce problème général. La question particulière des paradoxes temporels y est résolue très simplement : seul l'actuel est réel (on ne peut en sortir qu'imaginairement, il n'y a donc plus de paradoxe possible). Et la question de l'action tout aussi simplement : elle n'est jamais réelle. On peut imaginer directement une action (représenter une pulsion, constituer un désir), mais on ne peut observer que ses effets. On peut aussi la conceptualiser, mais ce n'est plus alors qu'une idée, qu'une réalité subjective. L'action (portant sur la virtualité objective) est une tendance irréductible à un pur état ; en termes physiques, elle opère sur de la matière tachyonique. Son début ne se situe pas dans le temps mais dans l'espace : il se produit où le Moi décide de convertir une pulsion (subjective, centripète) en impulsion (objective, centrifuge) . Décider volontairement d'agir, c'est inverser immédiatement la polarité de l'espace.

C] Pour bien comprendre le sens philosophique de ce modèle et avant d'interpréter l'expérience de Libet dans ses détails concrets, je dois rappeler succinctement quelques notions élémentaires de psychologie. Chez le très jeune enfant, on ne peut évidemment parler encore de volonté et de raison. On peut néanmoins déjà très nettement distinguer des passages à l'acte plus ou moins cohérents, qui relèvent de la mobilité, et les opinions plus ou moins sensés que la connaissance de l'enfant émet à leur sujet, avant, pendant ou après eux. C'est tout au long de l'enfance et de l'adolescence que ces facultés vont se développer : plus elles s'autodéterminent et mieux elles déterminent le monde extérieur. Autrement dit, la pensée ne devient elle-même qu'en étant le plus autonome possible, c'est-à-dire libre. Le libre arbitre ne consiste évidemment pas à pouvoir penser n'importe comment, mais au contraire à s'imposer, globalement et par principe, certaines contraintes de cohérence (des "normes") : penser devient alors percevoir, concevoir, imaginer ou agir.

1) La connaissance (ou "pensée cognitive", statique) se constitue en raison à partir des sensations que lui impose la réalité extérieure : elle distingue, perçoit des objets ayant une relation temporelle irréversible qu'elle symbolise par la notion de cause et d'effet. Elle n'y parvient qu'en modélisant à l'intérieur d'elle-même cette réalité objective : elle fabrique des concepts (ses propres "objets") et des règles de déduction entre antécédent et conséquent (elle se crée un temps irréversible). La connaissance acquiert sa liberté en se structurant en raison. La raison est la liberté et l'efficacité de la connaissance. Son autodétermination.

2) La mobilité (ou "pensée conative", dynamique) se constitue en volonté en organisant l'énergie dont elle dispose en impulsions que lui autorise un monde extérieur centrifuge : c'est l'action. Elle n'y parvient qu'en modélisant à l'intérieur d'elle-même cette virtualité, cette potentialité objective : elle fabrique des pulsions et des règles de représentation qui vont constituer un espace polarisé dans l'autre sens, celui de l'imagination. La mobilité acquiert sa liberté en se structurant en volonté. La volonté est la liberté et l'efficacité de la mobilité. Son autodétermination.

La personnalité est constituée quand il existe une certaine complémentarité, une relative harmonie entre Raison et Volonté. Mais l'existence est néanmoins faite aussi de leur conflit. Entre "décider d'agir" (jugement de la raison) et "agir" (passage volontaire, contrôlé à l'acte), il peut y avoir un abîme. Je peux très bien, intellectuellement, décider d'aller au cinéma demain ou de me coucher tout de suite, ce n'est pas pour autant que je passerai à l'acte. Pour tel gros fumeur, il peut devenir insupportable pour la raison (jugement délibératif dans le temps) de mourir jeune sans que cela le fasse réellement arrêter de fumer. Il existe par contre des jugements volontaires (délibératifs non dans le temps mais dans l'espace) à effet toujours immédiat : un caractère ferme refusera soudain que l'envie de fumer dicte sa conduite, et arrêtera aussitôt de fumer. Mais, pour que cette décision soit durable et ne cède pas à des sollicitations indirectes, il faudra souvent – au moins au début – s'entourer de quelques rituels.

Refermons cette parenthèse psychologique et abordons maintenant le débat proprement scientifique et philosophique du déterminisme. Commençons d'abord par la notion de décision. Il est maintenant clair que la décision rationnelle d'agir, qui est un jugement temporel, ne doit pas être confondue avec la décision volontaire d'agir, qui est un jugement spatial (et donc instantané). On constate donc que la "décision d'agir immédiatement" est ambiguë : elle est toujours volontaire, mais parfois aussi rationnelle. De plus, pour la raison, la notion de jugement / inconscient (comme une "décision inconsciente d'agir à telle heure de telle façon à tel endroit") est impossible parce que contradictoire dans les termes. Enfin, est également absurde pour la raison – et donc impossible – l'existence d'une décision d'agir après que l'action correspondante a eu lieu .

Ma position théorique est la suivante. D'un point de vue volontaire (virtuel, imaginaire), la décision coïncide nécessairement avec le début de l'action . Alors que d'un point de vue rationnel (réel), décision et action sont temporellement dissociées : dans une conception (subjective), la première est toujours antérieure au début de la seconde ; et dans une observation (objective), elle lui est toujours postérieure puisque la décision n'appartient plus alors au sujet mais à l'observateur, qui ne peut raisonner qu'en rétrodiction.

D] Dans l'expérience de Libet, ces trois déterminismes sont intriqués, et il s'agit d'en décrire correctement l'interaction. Je rappelle d'abord qu'une décision inconsciente d'agir est purement volontaire et ne peut donc à ce titre être contrainte causalement. Voici maintenant les résultats expérimentaux. Les "potentiels de préparation" dans la région cérébrale motrice débutent 400 ms avant la décision déclarée [C]. L'instant C est contrôlé et corrigé par un stimulus cutané. Entre cette décision et l'émission d'influx nerveux hors de l'aire motrice, il s'écoule 200 ms, ce qui laisse le temps au sujet – on l'a vérifié – de changer d'avis et d'inhiber son geste (fléchir la main) durant les 150 premières ms. Le rétro-PK semble donc incontestable.

Néanmoins, et je me fais ici l'avocat du diable, il est paradoxal pour tout sujet d'agir à un moment volontairement indéterminé quand il doit regarder une horloge pour pouvoir dire après coup à quel instant il aura agi. On ne peut de plus exclure un délai physiologique et/ou psychologique. On peut donc admettre une certaine marge d'incertitude [M] entre l'instant (strictement ponctuel, mais non repérable directement) de la décision volontaire [D] et l'instant (étendu) de la conscience qui lui est associée [C » t0]. Si M > 400 ms, autrement dit s'il faut peut-être plus de 400 ms pour aller de D à C, alors il n'y a plus rétro-PK avec certitude. La contre-décision étant toujours possible dans les 150 ms qui suivent C, cette marge est très vraisemblablement < 150 ms. Le rétro-PK est donc bien avéré.

Reste à envisager une fraude délibérée, bien que Libet ait certainement choisi un sujet dont il était sûr qu'il suivrait le protocole, et que d'ailleurs aucun défenseur de l'hypothèse causale n'ait évoqué cette hypothèse. En bon parapsychologue, je dois en tenir compte. Le sujet aurait alors cherché consciemment à prendre sa décision volontaire à t0 ? La marge d'incertitude serait alors encore plus faible… Mettons pourtant une dernière fois les pieds dans le plat cognitiviste. La délibération rationnelle (forcément consciente) sur une action future ne détermine jamais objectivement son moment et sa forme ; elle ne fait que les suggérer à la volonté, que proposer des concepts à l'imagination. L'énergie corporelle était déjà là avant même la délibération ; et pour que cette énergie potentielle se transforme en impulsion adéquate, il faut que la volonté accepte librement de coopérer. La raison n'a aucunement, par définition, le pouvoir de produire un mouvement objectif indépendamment de la volonté ; elle peut tout au plus "catalyser" à un certain moment (et donc consciemment) l'excitation immédiate d'une région motrice. L'ensemble d'un tel processus n'est donc régi ni par la raison ni par la volonté, mais par les deux à la fois, c'est-à-dire par la personnalité du sujet dans une certaine situation existentielle.

En définitive, ce qu'on mesure dans l'expérience de Libet est bien la distance temporelle entre une décision volontaire d'agir (libre parce qu'autodéterminée, mais ni causale ni finale), consciente accessoirement (uniquement pour repérer son moment), et la première manifestation cérébrale motrice de cette décision. Que le protocole ait été ou non moralement respecté par le sujet !

 

6. Vous me demandez ma définition de la conscience. Je vous ai déjà donné les éléments de la réponse. Il n'y a conscience (connaissance) possible que de quelque chose. On est toujours conscient de quelque chose et inconscient du reste. Les notions substantielles de Conscience et d'Inconscient en soi sont de pures logomachies qui égarent la recherche scientifique. La conscience peut être tournée vers l'extérieur, vers l'intérieur ou les deux à la fois, locale ou globale, englobante ou englobée, etc. Elle peut aussi bien s'exercer de veille qu'en dormant : quand je rêve, et sans du tout qu'on puisse appeler cela de la lucidité onirique, je sais que je me fabrique un spectacle autant que de veille je sais que je perçois une réalité dont je ne suis pas l'auteur.

A propos d'herméneutique d'ailleurs, croire que le rêve a systématiquement pour la veille (pour la Conscience) un sens qu'on peut rationnellement décrypter vaudrait nécessairement pour un gribouillis de chimpanzé ou un tableau, fût-il le plus beau du monde du monde. Or le sens d'un symbole, c'est sa forme : chacun la projette, la fabrique, la voit ou l'interprète différemment selon sa personnalité, sa culture, son humeur et les circonstances. Et si certaines œuvres d'art font pourtant une relative unanimité, c'est que l'explication poétique est la seule universelle et que l'affectivité est l'unique essence du monde. Une Bible, quelle qu'elle soit, ne révélera jamais rien de plus.

 

7. Explication des cas que vous me citez :

a) La télépathie n'est pas une explication mais une étiquette, contrairement à l'auto-prémonition. J'ai écrit tout un article à ce sujet, dont une version récemment remaniée se trouve sur le site Gerp. Au moment où la femme est informée réellement de la mort de son mari, elle effectue un rétro-PK sur elle-même pour que sa représentation de l'accident ait lieu au moment de la mort de son mari. Manière comme une autre d'amortir le choc affectif à venir et illustration d'un feedback négatif, qui consiste toujours à supprimer une perturbation initiale.

b) Si un sujet croit à l'efficacité d'un rituel, les chances de réussite seront évidemment augmentées. Et inversement. C'est du placebo. Le ganzfeld n'a pas le moindre intérêt. C'est comme si je vous conseillais le port d'espadrilles pour créer, puisque avec moi ça marche. Selon mes calculs, et après métanalyse scrupuleuse et complète, mes résultats passent alors de 20 à 80 %. De vraies bottes de sept lieues ! Les meilleures sont évidemment les usagées. Prix intéressant, à débattre. Il est vrai que les performances du short de Picasso sont encore supérieures, mais le prix est prohibitif…

c) Un bras de quelle nature : ectoplasmique, organique, en papier ? Apparition éphémère ou définitive ? Des ectoplasmies (toujours temporaires) de telles formes sont parfaitement avérées. L'ectoplasme, c'est une figure onirique qui se matérialise progressivement. Du théâtre dans un espace objectif devenu centripète, où acteurs et spectateurs interagissent immédiatement. Sa nature physique n'a rien de spécifique : ionisation atmosphérique, plasma, foudre en boule, etc. Pour détails, consulter mes deux anthologies sur les fantômes et les apparitions (Tchou-Laffont). Votre demande d' "explication" est équivoque. Chaque cas est singulier. Le problème actuel du parapsychologue est d'abord d'exposer un mode général de raisonnement. Ensuite, de l'appliquer à une spécialité s'il en maîtrise une (physique des plasmas, mise en scène théâtrale, etc.). Enfin seulement, et si le cas le mérite, d'en faire la description la plus complète possible.

Pour ce qui est d'un membre organique définitif, on possède un cas fort documenté d'une jambe coupée qui a repoussé instantanément (voir dans la même collection mon anthologie sur les guérisseurs). Le rêve – qui avait duré cette fois trois ans, de jour comme de nuit – est ici antérieur à sa matérialisation. Mais, là encore, le parapsychologue doit expliquer le processus en termes de circuit psi, qu'il soit embryologiste, psychosomaticien ou scénariste.

Quant à admettre le cas d'un bras organique qui viendrait subitement et définitivement s'ajouter aux deux autres, il faudrait supposer un sujet dont le seul rêve eût été de se produire comme monstre chez Barnum. L'hypothèse, au moins sur terre, est exclue. Mais elle reste plausible sur Mars si l'on en croit certains témoignages, notamment celui de Frederic Brown.

 

8. La lune fait-elle aussi du contre-PK ? Mais certainement si on la décrit dans le cadre d'un système écologique. Une "table tournante" est parfaitement vivante au moment où elle tourne : elle est le corps dont l'esprit d'un agent (du médium bien sûr, pas d'un décédé) est devenue temporairement l'âme. C'est l'argument même de Gasparin. Traduit en termes parapsychologiques modernes : la vie et la non-vie ne sont que des points de vue spatio-temporels.

 

9. Le monde objectif comme résultat d'un compromis entre les sujets existants : c'est seulement la moitié de ma métaphysique. Qui n'est pas polythéiste, mais animiste, c'est-à-dire complémentariste. Le déterminisme fonctionne dans les deux sens. Il n'y a pas d'une part des créateurs et de l'autre des créatures. Tous, nous sommes dans l'espace-temps les deux à la fois. Il n' y a pas une Matière qui s'opposerait radicalement à un Esprit, ni de dépendance univoque entre les deux. Il y a la vie, partout et toujours. En puissance et en acte. Avec de la naissance et de la mort. Des conflits. De l'amour avant et des cadavres après, qui tôt ou tard, ici ou ailleurs, par recombinaison réelle ou imaginaire, se réincarnent. Ad vitam æternam.

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Très cordialement