PROPOSITIONS pour un CONSENSUS sur le PSI

(Revue Parapsychologie n°20, janvier 1986)

Pascal MICHEL, François FAVRE, Pierre JANIN, Guy BENEY, Emmanuel HEMMERLIN (1985)

Note d'introduction (par Pascale Catala).

 

A l'initiative de Guy Béney en 1982, les principaux chercheurs du GERP avaient donné une liste de propositions concernant le psi dont la forme fut d'abord discutée en réunion et éventuellement modifiée, puis le contenu soumis à un vote individuel.

 

Voici d'abord la liste numérotée de ces propositions, par auteur :

 

Pascal MICHEL

 

1. Le "psi" relève d'une unique explication.

 

2. La croyance au psi est un fait sociologique majeur.

 

3. Le psi expérimental est non reproductible ; et, plus généralement, il s'esquive face à l'approche scientifique.

 

4. Dans la population, les personnes qui croient au psi, et celles qui n'y croient pas, forment deux groupes dont les membres sont toujours en nombre suffisant pour avoir une importance sociale.

 

5. Le psi est une grande source de mythes.

 

6. Les mythes véhiculés par le psi, comme tous les autres, se succèdent par vagues : ascension, apogée, décadence.

 

7. Les mythes véhiculés par le psi sont éphémères : seule une reconstruction de l'histoire fait croire à leur pérennité. Ils sont en cela semblables aux théories scientifiques.

 

6. Celui qui se fait l'instrument du psi en prêchant un mythe à la mode se verra momentanément réussir au-delà de ce qu'il prévoit : c'est "l'effet d'expérimentateur", renforcé par la société,

 

9. Le parapsychologue a le devoir déontologique d'analyser les mythes véhiculés par le psi sans se faire l'instrument de leur propagation.

 

François FAVRE

 

10. Les événements psi ne semblent pas pouvoir être décrits comme une transmission causale d'énergie.

 

11. L'ambilocation macroscopique à grande distance n'a jamais été observée.

 

12. La dynamique du psi est en partie finale.

 

13. Tout événement psi est au minimum une coïncidence significative, qui résulte toujours en partie d'une construction arbitraire.

 

14. Tout événement psi suppose une attitude affective.

 

15. Les limites des événements psi sont dues à des facteurs mentaux (individuels ou collectifs) et non matériels.

 

16. La prémonition n'excède jamais deux générations.

 

17. Tout objet est doué de psychisme.

 

18. Les hommes ne peuvent pas décrocher la lune par PK.

 

19. Le phénomène OVNI est une catégorie particulière d'apparitions psi.

 

20. Les apparitions psi objectives sont, comme n'importe quel effet PK, des images mentales matérialisées.

 

21. En admettant qu'un homme, en tant qu'individu, est capable de faire un PK, aucun animal en tant qu'individu n'en est capable.

 

22. La psycho-somatique, à elle seule, rentre dans le champ de la parapsychologie.

 

23. L'homéopathie se réduit à l'effet placebo ou nocebo.

 

24. Il n'y a aucune différence physiologique décelable entre télépathie, clairvoyance et prémonition.

 

25. Le souvenir et la prévision rationnelle sont du psi reproductible.

 

26. Le champ du psi est la métaphysique.

 

27. Diverses personnes ne peuvent pas faire coïncider leur rêve, même si celui-ci est matérialisé.

 

28. L'acupuncture traditionnelle est du psi.

 

Pierre JANIN

 

29. En apparence comme en profondeur, le psi contredit la vision matérialiste -couramment dite "scientifique" en Occident - essentiellement parce qu'il réintroduit le psychisme comme dimension à part entière dans l'univers.

 

30. Cet état de choses a toujours été plus ou moins clairement perçu, au moins en Occident ; il est la raison principale de la fascination exercée par le psi et de la marginalisation constante de la parapsychologie par une majorité "anti-psi".

 

31. Le psi abolit la séparation ordinaire entre le monde intérieur, psychique, et le monde extérieur, physique, en faisant de chacun le reflet direct de l'autre. Il est donc un signe de l'unité potentielle de l'univers derrière la dualité dont nous faisons l'expérience dans la vie quotidienne et qui a nourri les méditations de tant de philosophes depuis que le monde est monde.

 

32. Le psychisme étant irréductible au physique et vice-versa, une interprétation uniquement physicienne du psi est exclue, de même qu'une interprétation uniquement psychologique.

 

33. Plus l'intuition essentielle de l'unité potentielle de l'univers est faible, plus le psi se fait exceptionnel et scandaleux, et réclame d'être passé au crible sévère de la raison analytique par une recherche froide, tâtillonne sur le problème de la preuve, et inquiète quant à la théorie. Inversement, plus l'intuition de l'unité est acceptée, plus le psi devient au contraire "normal" et rassérénant, tandis que les exigence de la raison cèdent le pas à un accueil amical et sans phrases, et que la fonction de chercheur évolue progressivement vers celle de témoin actif.

 

34. La polémique entre pro et anti-psi est donc d'abord un conflit entre deux options métaphysiques dont chacune tend à créer ses propres évidences expérimentales. Par conséquent, pour quiconque est suffisamment convaincu de son choix, la polémique est une perte de temps. Dans les autres cas, elle peut avoir une valeur pédagogique.

 

35. Toute attitude psychique étant contagieuse, à n'importe quel moment le rapport des forces pro-psi/anti-psi peut évoluer plus ou moins brusquement dans l'un ou l'autre sens. Cependant, vu l'efficacité des moyens de communication actuels d'une part, et l'état de crise de la pensée matérialiste d'autre part, le pronostic pour les temps à venir serait plutôt favorable à l'attitude pro-psi.

 

 

Guy BENEY

 

36. La vocation du GERP, association sans but lucratif, est d'étudier -depuis 1971- le domaine des événements "psi" (objectivement inexplicables ET subjectivement compréhensibles), sans a priori rationaliste ni spiritualiste. La compétence multidisciplinaire de ses membres (physiciens, ingénieurs, biologistes, psychologues, etc.) lui permet de concilier ouverture d'esprit et recul critique, reconnaissance et encouragement des opinions diverses et cohésion du groupe. Parmi ses activités : bibliothèque - groupes de travail (expérimentation, vécu psi, théorie) cours - publications (dont le bulletin Psitt et La Revue de Parapsychologie).

 

37. Le GERP n'entend pas être un lieu où l'on tente à tout prix de faire entrer la problématique psi dans un cadre scientifique (réductionnisme physique, physiologique, etc.). Par contre, il estime que l'approche scientifique critique est indispensable en parapsychologie, au moins en tant qu'hygiène intellectuelle, garde-fou, voir comme moteur d'une réflexion poussée.

 

38. L'approche du GERP n'est pas (seulement) scientifique ; elle est (aussi) épistémologique, psychologique, psychanalytique, morale, etc.

 

39. Le GERP s'efforce de s'opposer à toute récupération et exploitation de la problématique psi dans un but commercial , de volonté de puissance.

 

40. Le GERP entend ne pas être une entreprise à faire de l'argent, sous couvert de son statut d'association de type 1901 à but non lucratif. Pour cela, il n'entend commercialiser, par nécessité vitale, que ses réflexions sur le psi.

 

41. Le GERP n'entend pas être un lieu destiné plus ou moins ouvertement à prouver la survivance, au moyen de telle ou telle démonstration de l'existence d'un corps "énergétique", ou de la possibilité d'une communication avec des entités désincarnées. A l'inverse, il n'entend pas non plus être un lieu de dénégation pure et simple de la survivance, car il n'oublie pas qu'à l'heure actuelle la parapsychologie se heurte à une indétermination objective de type "GESP (*)/survivance". Pour ces raisons multiples, le GERP reste neutre quant au problème de la survivance.

 

* GESP = General Extrasenry Perception = ou télépathie ou clairvoyance ou

les deux à la fois (NDLR).

 

42. Le GERP considère qu'une des approches pertinentes de la problématique psi consiste à élever la réflexion parapsychologique au plan social. Ainsi se voient dépassée la polémique pro/anti-psi , rélativisé le vécu individuel et contrebalancé la tendance à l'extrémisme solipsiste.

 

43. Si dans un texte défendant la parapsychologie on peut lire de façon repétitive - "un éminent scientifique de l'université. . ." (référence le plus souvent américaine) ; - "le prix Nobel Untel . . - "résultat fascinant, obtenu au moyen de tels matériel et appareillage ultra-sophistiqués..." - etc. ; ... on a affaire à un auteur qui récupère, naïvement ou hypocritement, la crédibilité de l'approche scientifique et technique (cosmocentrique) comme argument d'autorité, afin de (se) convaincre du bien fondé de son option pro-psi (d'essence sociocentrique et/ou ipsocentrique).

 

44. Dans l'état actuel des choses, la terminologie la moins critiquable parait être la suivante : psilogie, psikinésie (PK), psiesthésie (PE).

 

45. Pour comprendre le domaine du paranormal en profondeur et dans son en semble, il importe d'abord de reconnaître l'existence, en psilogie, de plusieurs niveaux de discours, dont le mélange constitue une des princi pales causes de confusion. Il conviendrait de distinguer, dans l'ordre suivant, les approches : "classique", expérimentale, épistémologique, sociologique, existentielle. Chacune de ces approches aborde le psi selon une conception et avec une méthode, des concepts qui lui sont propres.

46. L'événement psi semble a priori conventionnellement impossible car il suggère de façon plus ou moins évidente une subversion radicale de ce référentiel par l'inversion de la relation habituelle de l'être au monde (perception <->projection).

47. La psilogie expérimentale n'a pas démontré l'existence de l'aura humaine ou du corps subtil.

48. L'appareil Kirlian, par la multiplicité de paramètres non contrôlés, ne peut permettre la démonstration de l'existence d'un corps énergétique.

Par contre, au plan social, l'effet Kirlian fait partie intégrante d'un courant mythique venant alimenter des mythes comme

- la survivance ;

- la "scientificité" de l'anatomie occulte, qu'elle soit spirite, hindouiste, tantrique, etc. ;

- la validité des médecines "parallèles" (existence d'un corps subtil, etc.)

Cependant, il existe au moins un phénomène authentiquement paranormal et spécifiquement relié à l'effet Kirlian, celui de la feuille fantôme (non reproductibilité).

 49. Dans une PK, l'indéterminabilité fondamentale du sous-système en psikinésie affecte aussi bien la source que la cible. Ainsi est-il absurde de vouloir fabriquer un "PKmètre". En outre, tout résultat obtenu avec un "PEmètre" -un appareil visant à objectiver des corrélats physiques et physiologiques à la psiesthésie- est également entachée d'une indéterminabilité fondamentale, du type "corrélat de la PE / PK sur l'appareil". Enfin, il est impossible de démontrer qu'on a créé un "PKgène" -une machine susceptible de produire des événements psikinésiques, des poltergeists par exemple- car on ne peut identifier le sous-système responsable éventuellement de la PK. Ainsi est-il abusif de prétendre que telle personne ("sujet psi"), ou bien le cerveau, ou encore tel appareil sont des PKgènes.

 

50. Il y a indétermination entre rétroPK et PK actuelle + prémonition.

 

51 . Il y a souvent indétermination entre télépathie, clairvoyance et prémonition. D'où l'intérêt des termes "psiesthésie" ou "percipience".

 

52. Il y a indétermination entre prémonition et psikinésie.

 

53. Il y a indétermination entre PE et PK (=Psi).

 

54. Il y a indétermination entre PEmètre et PKmètre.

 

55. Il y a indétermination entre psi du sujet et effet d'expérimentateur.

 

56. Il y a indétermination entre effet d'expérimentateur et effet de société.

 

57. Il y a indétermination entre psi animal (ou végétal) et psi anthropocentrique.

 

58. Il y a indétermination entre effet de société et vécu solipsiste.

 

59. Il y a indétermination entre holon transpersonnel et instance impersonnelle.

 

6C. Il y a indétermination entre GESP et survivance.

 

61 . Il y a indétermination entre rêve lucide et hors-corps.

 

62. Il y a indétermination entre rêve lucide et événement psi à l'état de veille.

 

63. Le psi est foncièrement réfractaire à l'investigation de type scientifique. Les résultats obtenus en psilogie expérimentale sont "pipés", mythiques. Mieux, vouloir démontrer l'existence du psi , c'est désirer que les résultats soient pipés. Dès le départ, la Psilogie est donc anti-scientifique. En fait, elle semble jouer une fonction d'anti-science au sein d'une société.

 

64. La psilogie de laboratoire se voit contestée dans son objet même, et paradoxalement, par la prolifération des concepts issus de son sein et tous plus subversifs les uns que les autres vis-à-vis de la méthodologie de type conventionnel , qui a pourtant permis de les mettre en évidence : la psikinésie, l'effet d'expérimentateur, l'indétermination multidimensionnelle, la dissolution du cadre expérimental, le conformisme doctrinal, etc

 

65. Par sa prétention épistémologique énorme, par son inefficacité flagrante, l'anti-scientificité du discours psilogique est apparemment absurde. La psilogie expérimentale conduit à une série de paradoxes et se boucle en une tautologie. Au nom de la rationalité conventionnelle et de l'efficacité "technique", on ne peut que rejeter l'ensemble de la problématique psi.

 

66. En résumé, à cause de son objet d'étude qui "chevauche" l'articulation primordiale (sujet/objet, esprit/matière, intérieur/extérieur, etc.), bien qu'elle puisse s'évertuer à paraître rigoureusement scientifique dans ses méthodes, la psilogie s'avérera malgré tout inéluctablement anti-scientifique dans ses résultats ... et c'est peut-être sa fonction sociale.

 

67. En psilogie, la distinction entre résultats de laboratoire et événements psi spontanés n'est pas pertinente, car il s'agit dans les deux cas d'événements historico-sociaux, de "psiphanies".

 

68. En socio-psilogie, l'affirmation "l'existence du psi a été prouvée en laboratoire" n'est pas pertinente, car l'existence du psi relève d'une option individuelle (désir, vécu, opinion, ... ).

 

69. Au plan social, la psilogie expérimentale tient lieu de "sas" pour ceux qui ont besoin d'appliquer la méthodologie scientifique au psi (pour s'en démontrer l'existence et la propension à "boire l'obstacle")., afin de passer d'une conception du monde basée sur la logique conventionnelle, à une autre qui rend compte en outre de l'affectif, du symbolique et de l'onirique.

 

70. Dans la dynamique psi, il est possible de dégager les constantes suivantes: les sensitifs semblent plus contrôlés par leurs facultés psi qu'ils ne les contrôlent. Donc, s'il y a efficacité au plan social, il n'est pas justifié qu'ils s'attribuent ou qu'on leur attribue de prétendus "pouvoirs".

 

71. Le psi parait faire des incursions épisodiques dans notre monde physique en s'abstenant de laisser des preuves de son existence qui puissent emporter l'adhésion unanime (finalité psychosociologique, voire intrinsèque du psi).

 

72. Le psi apparaît d'une sagacité extraordinaire, d'une espièglerie manifeste, bien supérieures à celles de la personne à laquelle on attribue le déclenchement des phénomènes.

 

73. Il semble que l'ensemble de la dynamique psi soit amorale (par rapport à la morale conventionnelle).

 

74. Il existe d'autres disciplines qui relèvent implicitement de la même problématique expérimentale, épistémologie et psychosociologie, que la psilogie. C'est pourquoi elles peuvent être considérées comme des domaines "crypto-psilogiques". On peut citer les principales : les recherçhes psychophysiologiques orientées dans le sens psyché -> soma, l'hypnologie expérimentale, la problématique néolamarckienne visant à démontrer l'hérédité des caractères acquis, l'investigation psychosomatique effectuée au moyen de la technique dite de rétroaction biologique ou plus généralement par l'étude de l'effet placebo, nocebo, ...

 

75. L'interrogation épistémologique majeure posée par la psilogie est la suivante : quelles sont les limites du domaine de validité de la méthodologie scientifique (conventionnelle) ? L'étude de la dynamique psi semble suggérer : c'est toute recherche dont l'objet d'étude n'implique apparemment pas le facteur psychique. Ainsi la neurophysiologie est-elle une science conventionnelle, alors que la psychophysiologie serait un domaine "crypto-psilogique". De même, la microphysique restera une science tant qu'elle ne se sera pas vu contrainte, événtuellement, d'introduire l'affectif dans son champ d'investigation. Si cela s'avérait, sa problématique fusionnerait alors avec celle de la psilogie.

 

76. Les événements psi suggèrent de poser, plus ou moins confusément, mais impérativement, l'existence d'un foyer de structuration du réel en plus du foyer "cosmocentrique" (le "Big Bang" et ses suites). Ce second foyer se révèle contre toute attente sis au plus intime de l'être dans le monde. On peut ainsi l'appeler "ipsocentrique".

 

77. La dynamique psi correspond à la zone d'affrontement, à l'interface du cosmocentrique et de l'ipsocentrique ; elle comprend de façon complexe, l'interface -conventionnelle bien que mystérieuse- de l'articulation psychosomatique.

 

78. On peut appeler "mythe psi " la suggestion plus ou moins explicite émanant des psiphanies, d'une subversion -latente mais radicale- du référentiel quotidien, matérialiste. Il est la plupart du temps inconscient car "coloré", "biaisé" par tel ou tel mythe secondaire qui en édulcore l'enjeu. Il s'adresse au départ à l'inconscient de l'être dans le monde, tout en offrant à son conscient matière à s'accrocher à une représentation tangible, d'apparence même cosmocentrique (support énergétique, hypothèse extraterrestre, acupuncture, ondes de forme, etc.).

 

79. Il existe quatre phases principales du "cycle d'une expression du mythe psi". Prenons le cycle "en marche", à la phase de déclin de l'expression mythique .

 

80. Il convient de dépasser l'engagement dans la polémique pro/anti-psi en l'analysant au plan social. Il faut distinguer le "psiphile" qui étudie la problématique psi avec le plus de recul critique possible même si -ou d'autant plus qu'- il a un vécu psi non négligeable, du "pro-psi" qui a tendance à subordonner sa réflexion à son rôle de militant car, se limitant à la querelle des pro et des anti-psi, il échappe à l'approfondissement de l'interpellation psi.

 

81 . Le "mythe psi" est encore plus profond que celui de l'Unus Mundus ; il est celui de la transgression des obstacles, de la subversion radicale du référentiel quotidien, de la conjonction des opposés, qui mène, à la limite, à la non-dualité. Schématiquement, on peut dire que la méditation sur la dynamique psi semble faire ainsi passer successivement de A à  , à A et  , à ni A ni  , enfin peut-être au "a-" (préfixe privatif).

 

82. La dynamique psi peut être perçue comme un piège, qui interpelle l'être dans le monde à l'aide de "koans" adéquats pou faire advenir le monde de l'être, progressivement, en un retournement ontologique radical. Il s'agit donc, globalement, d'un processus de "décréation" (voir S. Weil), peut-être régulé au plan social (holon ?, ... ).

 

83. Il semble que les vagues d'événements psi ont orienté successivement ou simultanément la réflexion des chercheurs et des personnes en général , sur divers sujets (voir liste dans Parapsychologie no 10, p. 40, § 19). Les colorations mythiques actuellement en progression sont les suivantes

- la convergence entre science et spiritualité ;

- l'objectivation en laboratoire et l'apprentissage de la lucidité onirique

- la spiritualisation de l'écologisme (auto-organisation au plan social , idolâtrie planétaire).

 

84. La plupart des psilogistes sont des individus mythophores qui acquièrent rarement un recul suffisant par rapport aux mythes qui les ont déstabilisés, qui les motivent, au point qu'ils y ont cristallisé leur action (survivance, expérimentation, convergence entre psilogie et physique, etc.) et qu'ils véhiculent ce faisant. Ils introduisent ainsi le plus souvent, plus ou moins insidieusement sous couvert de psi, une idéologie à caractère religieux, mâtinée de scientisme.

 

85. Au vu de ses travaux, il apparaît que le GERP, par son recul critique, réalise peu à peu une étude mythoclaste des courants mythophores : mythes spirite, de la pertinence de la méthodologie classique en psilogie, quantique expliquant le psi, du "sujet psi", du "Verseau", etc.

 

86. La principale limitation du psi semble être que ses expressions ne peuvent pas ne pas être élusives, principalement au plan des occurrences, mais aussi des colorations.

 

87. De même que celle d'un koan zen, la finalité de la psilogie serait de faire découvrir au psilogiste, dans sa méditation sur les contraires, combien l'essence de l'existence diffère de celle de l'intelligible. La réflexion psilogique ne serait, somme toute, rien d'autre qu'une forme occidentale et moderne de "yoga de la connaissance", de "jnâna yoga".

 

88. La dynamique psi repose sur une double contrainte. Elle est sous-tendue au plan collectif par deux situations-limites, contradictoires et complémentaires, que rencontre inexorablement l'être dans le monde :

 

89. Ces deux situations extrêmes, radicalement opposées, ces deux polarités -qui fondent le statut existentiel et spécifique, car conscient, de l'être humain- engendrent comme un "champ" affectif bipolaire à enracinement thanatique, fait de désirs inconscients et contradictoires, sources, au plan collectif, d'événements paranormaux et mythogènes adéquats (psiphanie ) dont l'expression (=occurrence + coloration) au plan social suggère par des clins d'oeil et en un clin d'oeil la possibilité d'une telle subversion radicale. Cependant, cette dynamique psi ne peut que suggérer, sempiternellement et élusivement cette subversion, à cause du risque d' "emballement" individuel et/ou collectif que représente l'immixtion des logiques affective, onirique et symbolique au sein de la logique "cosmocentrique" de l'état de veille. Le conflit sous-jacent engendre donc une régulation de la dynamique psi - au plan social, comme au plan individuel en général, "il doit faire psi" mais pas trop.

 

90. La variété toujours renouvelée des multiples colorations que présente la dynamique psi la fait apparaitre comme une sorte de jeu kaléidoscopique du conflit existentiel primordial -et généralement inconscient- de l'être dans Ie monde, démultiplié et intriqué à l'envi, en un écheveau sybillin des destinées étendu "métachroniquement", et qu'on peut qualifier de holon transpersonnel.

 

91. Par le concept de dérépression , il y a convergence, dans l'indétermination propre à la béance du mourir, des aspects social (régulation des dérépressions psiphaniques) et psychosomatique (dérépression radicale de cette articulation lors du mourir) de la psilogie.

 

92. L'enracinement thanatique de la problématique et du potentiel psi ne semble pas pouvoir permettre d'affirmer la survie individuelle, ni du reste de l'infirmer (indétermination "GESP/Survivance").

 

93. Le problème existentiel sous-jacent à la dynamique psi est propre à l'espèce humaine, donc indépendant de l'ethnie considérée. Un modèle psilogique, basé sur ce conflit, est donc "trans-ethnique", "universel", que le consensus social se soit fait autour de la pensée magique ou du doute méthodique.

 

94. Les événements psi sont destinés à engendrer et à maintenir une hétérogénéité au sein de la population. Le consensus total, l'adhésion unanime les concernant est donc impossible, dans quelque ethnie que ce soit.

 

95. De par leur insertion dans le monde, les plantes et les animaux n'utilisent pratiquement d'outils que certaines de leur parties corporelles spécialisées (mandibules, pinces, pattes, etc.). Ainsi est-il probable que leur imaginaire (instincts, désirs, affects, etc.) soit plutôt en rapport avec le psychosomatique (PK sur le corps ?) qu'avec le psychophysique (PK sur l'environnement) . Nu, sans arme naturelle si ce n'est sa station verticale, ses pouces opposables et son cerveau, l'homme s'est vu contraint de forger des outils extérieurs à son corps pour s'adapter à son environnement et assurer sa survie. Le "culturel" l'a isolé peu à peu de la rudesse "inhumaine" du naturel, du cosmocentrique. Sa volonté de survivre s'est donc orientée principalement de façon extra-corporelle. Il a presque tout misé (sauf l'approche intérieure) sur l'outil, cherchant à le perfectionner sans cesse, jusqu'à le voir coïncider avec l'outil idéal qui lui permettrait enfin, sans médiation, de plier la réalité à son désir, cela au gré intarissable de "la folle du logis", qu'enflamme de surcroit la prise de conscience de l'inexorabilité de la mort. Ainsi, à la limite, l'imaginaire humain (rêves, fantasmes, intuitions) lui a suggéré la possibilité de l'outil idéal, de l'interface directe, de la psikinésie. La PK, est donc, sans doute, une problématique spécifiquement humaine.

 

96. Si l'on cherche à enraciner la problématique psilogique dans la dynamique évolutive, il y a lieu de ne plus considérer le psi au seul niveau de l'individu (réductionnisme "sujet psi"), mais aussi et surtout au niveau de l'espèce dans sa globalité, c'est-à-dire de tester cette hypothèse selon laquelle l'articulation psychosomatique est régulée par une articulation transpersonnelle (l'espèce, avec ses instincts, structures, etc. . . "spécifiques"). Cette idée que l'espèce représente le holon (niveau de structurel crucial , à la fois pour le processus de spéciation et comme source de la dynamique psi, fait prendre en considération la théorie "saltatoire" par "équilibre intermittent" de S.J. Gould et N.Eldredge.

 

97. La dynamique psi suggère de réintroduire l'hypothèse de l'existence d'un processus de type néo-lamarckien à l'oeuvre dans l'évolution biologique en plus de la sélection naturelle, aveugle et extérieure.

 

98. L'étude du mécanisme phylogénique passe tout autant par la prise en considération du vécu intérieur (chez l'homme : états non ordinaires de conscience, expériences de type "kundalini", de "mort/renaissance", etc.), que par l'analyse dia- (paléontologie) et synchronique des structures biologiques.

 

 

Emmanuel HEMMERLIN

 

99. Variante de 1 : Un phénomène non frauduleux relève du psi dans la mesure où il ne relève ni de la causalité mécanique, ni du hasard.

 

100.Corollaire : Selon la philosophie matérialiste qui, depuis Démocrite, veut que "tout ce qui existe dans l'univers est le fruit du hasard et de la nécessité", l'existence de phénomènes psi est exclue par définition.

 

101. L'existence des phénomènes psychiques, (en premier lieu la pensée) est à la fois indéniable et irréductible au mécanisme. Dans le cadre de la définition 99 les phénomènes psychiques sont des phénomènes psi.

 

102.De leur côté les phénomènes classés comme psi frappent par Ieur intentionnalité ou leur signification ; c'est précisement parce qu'ils évoquent l'intrusion du psychique dans le mécanique qu'ils sont intuitivement classés comme psi.

 

103.La question de la relation entre psi et psychisme est une question qui se pose de plein droit.

 

104.La signification revendicatrice du psi au plan philosophique (justifiée ou non) est la primauté du psychique sur le physique.

 

105.Dès lors il n'y a pas lieu de s'étonner que le psi expérimental soit non reproductible et s'esquive face à l'approche scientifique (cf. 3).

106.Les indéterminations fondamentales mises à jour à propos des phénomènes psi confirment à la fois l'inadéquation de l'approche scientifique classique en la matière et la validité de la définition 99, à moins que l'on considère intentionnalité et signification comme subjectivement et abusivement prêtées par le spectateur à des phénomènes relevant de la causalité mécanique, car alors les indéterminations quant à la source sont sans objet.

 

107.La télépathie est rebelle à toutes tentatives d'explication du type transmission mécanique par ondes ou corpuscules aussi extravagantes soient-elles. (inclus dans 10)

 

108.Du reste en matière de télépathie c'est la signification qui est transmise. (cf. F. Favre)

 

109.Dans la mesure où l'on admet le psychique comme non réductible au physique une conception de la télépathie comme relation de psychisme à psychisme ne pose pas problème.

 

110.Par contre toute modification matérielle survenant dans un phénomène psi pose le problème de la relation physique-psychique, évoquée par ailleurs sous les termes "articulation psycho-physique".

 

111. Ce "mélange des genres" choque profondement nos habitudes de pensée.

 

112.Toutefois l'apparente irrationalité du psi n'est due qu'à l'inadéquation de nos concepts.

 

113.De fait, notre difficulté à comprendre le psi vient de ce que seules les choses nous paraissent réelles dans la mesure où nous ne percevons le monde que sous cette forme. L'étymologie du mot "réel" (res = choses) est là pour nous le rappeler.

 

114.Dans ce contexte les mythes psi de type matérialiste répondent à notre besoin de voir le psi au travers de notions propres au référentiel quotidien et relèvent de l'attachement naïf à un matérialisme que les tenants de ce type de mythe souhaitent cependant voir subvertir. (cf. 78)

 

115.La notion de corps subtil ou "corps énergetique" etc .... dans la mesure où on le conçoit comme constitué d'une forme de matière restant à découvrir mais appartenant au monde physique, répond à la définition 114 du mythe psi.

 

116.Par contre l'idée de survivance en général n'y répond pas.

 

117.L'aspect mythique du corps subtil ne doit pas faire écarter l'idée d'un "corps psychique" responsable de l'élaboration intentionnelle de formes dans le monde physique - morphogenèse et production de formes complexes par PK

118.La relation physique-psychique de nouveau évoquée par 117, dans la mesure où "seul le semblable parle au semblable", incite à penser que "les choses ne sont pas les choses" (i e. que nous avons une mauvaise idée intuitive de ce que les choses sont au fond).

 

119.Notre besoin instinctif d'une vision plus unitaire va dans le même sens.

 

120.La psilogie et la mécanique quantique se rejoignent dans la mesure où l'on reconnait que l'une et l'autre nous enseignent que les choses ne sont pas les choses.

 

121 . Il est au moins nécessaire d'ajouter une composante psychique à la nature des choses.

 

122.La simple complexification mécanique ne peut produire la vie ou sinon une simple pierre tombant selon la loi de Newton est vivante à un faible degré.

 

123.La vie est un phénomène psi au sens de 99.

 

124.La vie relève de l'intentionnel.

 

125.Pour qu'un être vivant manifeste son intentionnalité par modification matérielle sans miracle l'articulation psychique-physique doit jouer en permanence.

 

126.Sauf "paralysie psychique" l'acte volontaire est un PK reproductible (psi ordinaire).

 

127.Inversement la prise de connaissance de notre environnement repose sur un fonctionnement inverse de l'articulation.

 

128.Le psi extraordinaire attaché à 127 est la psiesthésie.

 

129.Le cerveau résulte d'une spécialisation et met en oeuvre des interfaces physique-psychique privilégiés.

 

130.En tant qu'échappant, au déterminisme physico-chimique la pensée est "extérieure" au cerveau.

 

131. En droit la pensée est indépendante du cerveau.

 

132.Une étude critique des résultats de l'évolution des espèces incite également à faire appel à un psychisme "délocalisé".

 

133.Une construction progressive des êtres vivants tels que nous les connaissons n'est possible que si la vie -psychisme et intentionnalité- est chevillée au coeur de la matière.

 

134. Il existe différents niveaux de psychisme.

 

135.La difficulté du PK ordinaire consiste à faire parler entre eux des niveaux de psychisme différents.

136. Il est raisonnable de penser qu'une approche mystique peut aider à résoudre ce type de problème.

 

137.Ce que nous appelons matière est obtenu par le jeu de la statistique sur d'innombrables psychismes élémentaires non intégrés.

 

138.Aucun corpuscule substantiel n'est indispensable pour rendre compte des phénomènes microphysiques ; cette conception soulève au contraire nombre de contradictions logiques

 

139.L'aspect corpusculaire au sein des phénomènes microphysiques résulte de ce que l'on appelle effondrement, collapse ou réduction du "paquet d'ondes", pour autant que l'on sache non physiquement déterminé.

 

140.Le collapse du Y (psi) est actuellement la seule porte ouverte à l'articulation psycho-physique.

 

141 . Il convient de rappeler que la lettre Y a été choisie en mécanique quantique comme symbole de "quelque chose de mystérieux" ; il n'y a donc pas lieu de s'irriter outre mesure contre la colicicience éventuelle entre psi et Y .

 

142.Si l'on admet 138 rien ne s'oppose à considérer que, dans la nature, est seul objectif le choix effectué par une conscience. (i e. abandon de l'idée de matière substancielle comme support de l'objectivité.)

 

143.Dans son propre intérêt le GERP accepte et encourage l'expression rationnelle de ses courants minoritaires.


 

 

Voici maintenant les résultats actualisés pour 1985.

Voici ces mêmes résultats sous forme d'un fichier téléchargeable : ResulCons.zip

Les seules propositions qui sont acceptées par tous les participants sont les : 2,3,5,37.

ou presque tous : 1,6,24,30,34,38,39,40,43,44,47,49,75,78,80,97.

Et vous ? Qu'en pensez-vous ? Quelles seraient selon vous les questions de l'an 2000 ? Je vous conseille d'aller voir sur le site de J.P Basuyaux quelles sont les préoccupations actuelles de certains chercheurs.

Et rien ne vous empêche de nous envoyer votre propre liste de propositions !

 

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