A l'origine de la parapsychologie, il y a une longue période de traditions, de superstitions, de préjugés puis, au début du XX e siècle, une phase de recherches empiriques menées par des pionniers. Les résultats de leurs investigations, bien que contestables quelquefois, permirent à leurs successeurs de mettre au point des méthodes rationnelles écartant toute subjectivité. Malheureusement des "apprentis sorciers" fascinés par le " mystère " de certains faits reconnus mais inexplicables, menèrent eux aussi des recherches à leur manière, ce qui contribua à fausser l'idée que le public non averti peut se faire du paranormal. De nos jours encore, et plus que jamais peut-être étant donné la grande diffusion de la "presse à sensation", la commercialisation à outrance et sans discernement de tout ce qui a trait à l'extraordinaire, concourt à maintenir la confusion dans les esprits. Les revues dites spécialisées, les émissions de radio ou de télévision, les conférences publiques données par le moindre hypnotiseur de foire, qui se présente à son auditoire comme parapsychologue, semblent n'avoir d'autre but que de plaire à une clientèle considérée comme n'étant pas parvenue à l'âge adulte. Elles lui offrent du sensationnel à tout prix et du spectaculaire, quand elles ne poursuivent pas de façon avouée des objectifs politiques ou religieux.

Aujourd'hui que la parapsychologie s'est dégagée de tout ce qui était à son origine, et qu'elle accède à une véritable autonomie en devenant pluridisciplinaire, l'organisation et les conséquences d'une rencontre internationale de parapsychologie revêtent une importance incontestable.

Il apparut dès le début aux organisateurs de cette rencontre que s'il fallait informer l'opinion et les pouvoirs publics du stade qu'a atteint la recherche actuelle, il fallait parallèlement, combattre la méfiance envers elle, résultat de la confusion entretenue par les exploiteurs et les scientifiques " figés " dans un rationalisme dogmatique, ainsi qu'un certain enthousiasme aveugle aussi stérilisants l'un que l'autre.

Pour cela, il s'imposait de démystifier et démythifier la parapsychologie en rendant évidente son indépendance par rapport au fantastique, à l'occulte, au merveilleux. Il fallait démontrer de façon irréfutable la validité de la recherche en ce domaine, son caractère scientifique et son envergure pluridisciplinaire, tout en intéressant le public sans le rebuter ou le décevoir, mais en l'incitant à s'exprimer.

Les organisateurs de la rencontre firent appel à un certain nombre de spéciaistes ; douze, parmi lesquels plusieurs savants internationalement reconnus, répondirent favorablement.

Le 16 décembre 1975, le Grand Théâtre de Reims, premier lieu de la Rencontre, accueille une foule nombreuse. Quatre orateurs retenus pour cette soirée,

Hans BENDER, Rémy CHAUVIN, Hubert LARCHER et Nicole GIBRAT, ainsi que l'animateur Jean-Pierre CHEMLA, font face au public.

Edmond BERNARD, président du Chainon champenois, et l'un des principaux organisateurs de cette réunion, remercie le représentant de la municipalité de Reims pour son aide apportée au colloque, ainsi que le président de l'Université qui a bien voulu par sa présence cautionner la Rencontre, tout en participant à sa préparation. Il rend ensuite hommage aux spécialistes venus des quatre coins de l'Europe. Il termine son intervention en annonçant la création de la F.O.R.E.P (Fédération française des Organismes de Recherche en Parapsychologie) et la parution de la revue bimestrielle PARAPSYCHOLOGIE.

Le docteur LARCHER prend alors la parole pour faire en guise d'introduction un historique des trois sciences soeurs : la métapsychique, la parapsychologie et la psychotronique. Il établit leurs divergences ou tout au moins les nuances qui les distinguent les unes des autres, puis s'attache à montrer leur convergence dans l'objet (étude des trois grandes catégories de phénomènes) et dans la méthode (pluridisciplinarité).

Le professeur CHAUVIN, après un rapide exposé sur les méthodes expérimentales utilisées en parapsychologie et une incursion dans son domaine favori, l'expérimentation animale, estime que la parapsychologie ne doit plus tarder à devenir une science. Dans cette perspective, il se réjouit de l'intérêt que lui portent les physiciens.

Dans une intervention improvisée, le professeur Yves LIGNON, de l'Université de Toulouse, évoque les graves difficultés auxquelles se heurte la recherche parapsychologique en France : sarcasmes, campagnes hostiles, manque de moyens financiers.

La parole est ensuite donnée au professeur BENDER qui, à l'aide de nombreux documents audio-visuels, donne des exemples typiques de chaque catégorie de recherches et notamment celles menées sur les cas de Poltergeist de Rosenheim (1967). Il expose les expériences faites sur le sujet PK Suisse, SILVIO.

Avec le docteur Nicole GIBRAT, le public pénètre dans le domaine de l'inconscient. Il découvre l'exceptionnelle expérience d'un psychiatre doué de facultés PSI, chercheur psychologue qui a une clientèle composée en grande partie de sujets PSI. Le docteur GIBRAT explique pourquoi tant de ces sujets ont besoin d'une " prophylactie mentale " : ignorance, imprudence et témérité sont les principaux facteurs de désordres mentaux.

Le débat mené par M. CHEMLA, amène M. André SANLAVILLE, président de l'Institut de Parapsychologie et de Psychotronique de Lyon, à mettre en évidence les différences fondamentales qui existent entre une expérience d'illusionniste, et la même expérience faite par un sujet PSI sincère, sous le contrôle et la direction d'un chercheur scientifique.

M. Michel DEVÈZE, président de l'Université ayant à ses côtés M. le doyen BIERNE, qui avait tenu par sa présence à confirmer la sympathie manifestée au principe même de la Rencontre de parapsychologie, prononce une allocution d'ouverture :

La matinée comportait des exposés d'une très haute technicité du docteur GIBRAT et de M. COSTA de BEAUREGARD. Complétant son intervention de la veille, le docteur GIBRAT explique sa technique thérapeutique et psychanalytique pour venir en aide aux sujets PSI ayant besoin d'une "prophylaxie mentale". Quant à M. COSTA de BEAUREGARD, après avoir fait une synthèse magistrale des théories quantiques et de l'information, il propose un modèle pouvant permettre d'expliquer la psychocinèse. Des débats suivent ces exposés.

À la reprise de la séance, interrompue par le déjeuner, le docteur MOREAU rappelle l'importance attachée par des nombreux psychanalistes, depuis FREUD, à la parapsychologie et tout particulièrement à la télépathie. Il donne un aperçu saisissant de la lutte menée pour que la parapsychologie soit reconnue officiellement et dénonce le fait que lorsqu'un savant, qui s'est illustré dans une branche quelconque de savoir, est amené à se préoccuper de phénomènes PSI, une censure s'exerce sur son oeuvre, dont sont impitoyablement expurgées toutes allusions à la parapsychologie. Tel fut le cas pour FREUD, ses disciples et les dissidents de son École. Tel est le cas encore, en France, dans certains centres nationaux de la recherche scientifique.

Avec le professeur HASTED le public a une belle démonstration de l'ingéniosité d'un savant pour imaginer des procédés destinés à rendre impossible toute fraude, et inattaquables les expériences. S'aidant de diapositives, le professeur HASTED décrit les multiples expériences de laboratoire qu'il a accomplies avec différents sujets.

Il explique comment la physique quantique éclaire d'un jour nouveau la psychocinèse.

Le docteur DIERKENS expose ensuite les résultats de ses recherches sur " les états altérés de la conscience ". Il affirme en s'appuyant sur ses propres expériences que la profondeur de l'altération de la conscience ne correspond pas obligatoirement à une plus grande intensité de manifestation des capacités PSI. Selon lui, pour parvenir au PSI, il faut principalement changer certaines habitudes de conscience réceptive.

M. François FAVRE, dans un exposé brillant et bien documenté, fait l'historique de la parapsychologie par référence à l'histoire sociologique, économique et politique.

Après une interruption motivée par le dîner qui fut offert à l'assistance, Pierre JANIN suscita le plus grand intérêt, tant par son exposé sur la répétabilité, de l'expérience parapsychologique, que par la présentation d'un appareil de son invention, le tychoscope, appelé à révolutionner la recherche expérimentale en parapsychologie.

M. André DUMAS, faisant état d'expériences personnelles, développe alors l'idée à la fois poétique et réaliste du champ PSI, milieu de nature inconnue, qui serait commun à tous les êtres vivants, ou plus précisément les relierait entre eux et servirait à la fois de vecteur de transmission télépathique et d'accumulateur d'expériences.

Mme Yvonne DUPLESSIS, intervenant en dernier, donne un tableau complet des diverses méthodes de télépathie expérimentale. Une projection de diapositives illustre cette conférence, complétée d'un aperçu sur des expériences dermo-optiques.

Comme le fit remarquer M. François FAVRE lors de la discussion clôturant la Rencontre, le but de ces deux journées était de brosser un panorama analytique et non pas synthétique de la parapsychologie. Une synthèse n'est d'ailleurs concevable que dans le cadre de réunions entre spécialistes, et ne saurait concerner dans leur ensemble les différents phénomènes regroupés sous le terme de parapsychologie.