QU'EST-CE QUE LE PARANORMAL ?

(Ce qu'il n'est pas. Classifications. Méthodes)

Par François FAVRE


PLAN

A. THEORIE

I. Définition du psi

a. scientifique

b. autres

c. Ambitions de la parapsychologie

II. Terminologie

III. Taxinomie

a. Ecoles américaine et française

b. L'approche de l'auteur

1. Les significations inhabituelles
2.Les significations en général

IV. Méthodologie

a. Les procédures habituelles

1. qualitatives
2. quantitatives
3. associées

b. La méthode de l'auteur

B. PRATIQUE : Cas spontanés et expérimentaux

C. TEST

 


 

A. THEORIE



I. Définition du psi

 

En un sens restreint, la parapsychologie étudie scientifiquement les faits "magiques" (dits paranormaux ou psi), càd à la fois inexplicables dans l'état actuel de nos connaissances et déterminés par une intention. Au sens le plus large, elle étudie les phénomènes à dominante nettement finaliste. C'est une définition physiquement négative qui implique que le corpus de ces phénomènes évoluera nécessairement avec nos connaissances. Se résorbera-t-il entièrement avec le temps ? La réponse est non si l'on considère 1/ que tout raisonnement scientifique est fondé analogiquement sur le déterminisme irréversible du monde physique (la cause précède l'effet et l'engendre par un transfert objectivable d'énergie, support de l'information) et 2/ qu'aucun phénomène psi ne relève d'un transfert objectivable d'énergie (certains, sinon la totalité, d'entre eux se définissant avec certitude par une inversion temporelle).
Cette définition négative peut évoquer la morale en ce sens que celle-ci, dans un cadre intersubjectif (càd objectif à un certain niveau, mais final) s'énonce moins en termes positifs (obligation) qu'en termes négatifs (interdiction). Les sociétés ne peuvent en effet exister que s'il existe des règles contraignantes pour tous . Ainsi du tabou de l'inceste, commun à toutes les civilisations, ou des commandements de la Bible, pour les religions monothéistes. Mais, au niveau personnel, l'interdiction de l'inceste, comme le remarquait Lévi-Strauss , devient une obligation d'exogamie, "la règle du don par excellence" ; et les commandements bibliques peuvent être librement interprétés de façon positive, son expression négative préservant les choix de chacun.
D'autre part, il existe beaucoup de phénomènes qui ne sont pas traditionnellement considérés comme magiques et qui relèvent certainement en partie ou en totalité d'un déterminisme final : la conduite morale bien sûr, mais aussi la perception et la conceptualisation, l'imagination et l'action, la mémoire, les processus subjectifs (dits souvent à tort) inconscients, les désirs, les conversions psycho´somatiques, etc. En somme, toutes les significations, toutes les créations, tout ce qui appartient en propre au vivant. La parapsy théorique se doit donc d'intégrer ces phénomènes dans son champ propre. Dans cette perspective générale, on peut dire que les phénomènes psi recensés par les parapsychologues sont une catégorie particulière de significations (les inhabituelles, les nouvelles, les créatives), qui semblent en contradiction flagrante avec les modèles physiques contemporains. C'est pourquoi le psychanalyste Jung, en accord avec le physicien Pauli, avait objectivement défini le psi comme l'ensemble des coïncidences significatives acausales. Il aurait dû néanmoins ajouter "rares", car toutes les significations sont en partie acausales.

a. Définition scientifique


CRITERE COGNITIF : le psi est hautement improbable objectivement. Mais où est la ligne de démarcation entre coïncidence significative et information puisque toute information est subjectivement une signification nouvelle ? La différence entre les deux est qu'une information est purement quantitative, alors qu'une signification (notion plus générale) ne l'est pas.

CRITERE DETERMINISTE : le psi est par définition impossible au vu de l'idéologie causaliste des Occidentaux. Une relation de causalité implique à la fois une transmission objectivable d'informations et une durée non nulle entre cause et effet. Or le psi se caractérise soit par une inversion temporelle (par quoi on peut définir la subjectivité), soit par un transfert instantané (par quoi on peut définir l'imaginaire) et, dans les deux cas, par une transmission inobjectivable. Du point de vue de la physique moderne, ces trois propriétés sont liées. Il n'est donc pas étonnant qu'un événement psi, produit par un désir, transmettant une intention, contredise toujours une loi scientifique "causale" (qui porte sur un ou plusieurs phénomènes), quelle qu'elle soit. Imaginez la loi physique la plus générale qu'on puisse un jour concevoir : le parapsychologue (au moins le théoricien que je suis) fait le pari qu'on pourra toujours trouver un sujet psi qui produise un (ou des) événement(s) qui l'infirme(nt), mécaniquement ou statistiquement.

CRITERE COMPLEMENTARISTE : L'information et la signification ne relèvent pas seulement du cognitif, mais également du conatif : une action volontaire (qu'elle soit consciente ou non) informe et signifie.
L'objectivité d'une signification n'est pas indépendante du sujet. Elle est objective dans l'exacte mesure où l'on y croit. Une signification ne relève donc pas de la catégorie dualiste propre à la logique du tiers exclu (du vrai/faux : tel événement est objectif ou subjectif, réel ou imaginaire), mais du symbolique (à deux valeurs complémentaires au moins : la forme est aussi le contenu, la pulsion est aussi l'action, le signifiant est aussi le signifié). Dans cette perspective, l'essence d'une signification est un affect.
Ce qui, pour un individu, est évident, lumineux (càd "complémentaire") peut être, pour un autre, absurde, nonsensique (càd "contradictoire"). De plus, une signification fluctue, même pour un seul individu , selon le moment et le lieu.

Une grande difficulté de la définition du psi tient au type d'observation : niveau, mode, angle, etc. (et ce même dans un sens métaphysique) : ce qui est psi pour un observateur ne l'est pas pour un autre. Exemples :
- Cas le plus simple : un tirage de loterie. Si je rêve que je vais gagner avec tel numéro et que je gagne, ce résultat sera considéré comme strictement aléatoire, "normal" par un observateur neutre (si je ne lui ai rien dit) ou par un sceptique (même si je l'ai prévenu à l'avance). Par contre, une série de réussites successives contraindra le sceptique à attribuer au phénomène une signification, que cette coïncidence soit interprétée comme PK (à tort) ou comme ESP (à raison). La signification n'est liée qu'à la probabilité de coïncidences entre deux séries. Rappelons en effet qu'un événement physique anormal n'est jamais psi en tant que tel : c'est la coïncidence a-causale et significative entre cet événement et la déclaration (le souhait) du sujet qui est psi. De même, un rêve anormal (probable, répétitif) n'est jamais psi en soi, il est seulement psycho-pathologique ; pour parler scientifiquement de psi, il faut établir ou constater une coïncidence a-causale significative entre ce rêve et un fait extérieur. Enfin, la coïncidence peut très bien avoir lieu entre deux faits "normaux" (prémonition ci-dessus de la loterie, télépathie, clairvoyance) ;
- Niveaux différents : Une décision, finale, de l'Etat est un déterminisme causal pour moi (par exemple l'interdiction de fumer dans le métro) ; de même, dans la mesure où je décide de mon destin, cela pèse causalement, entropiquement, sur l'Etat. Entre partie et tout, le temps - comme l'espace - s'inverse.
François Mitterrand, tenant d'une histoire événementielle, demandait à l'historien Georges Duby si les apparitions de Jeanne d'Arc étaient "vraies". Celui-ci lui répondit que la question ne se posait par pour l'historien : le fait est que tout le monde y a cru et que l'histoire de France en a été changée ;
- Au même niveau, La croyance a priori est souvent décisive, déterminante. Ainsi les soucoupistes croient aux témoignages, même les plus farfelus ; alors que les rationalistes ne croient en aucun. Idem pour les miracles. Noter que le psi se produit même avec des charlatans, pourvu que le client y croie : exemples de voyantes, de guérisseurs ou de psychothérapeutes. Noter également la circularité sociale de toute rumeur : peu importe que le premier ovni signalé au public ait été réel ou imaginaire, certaines personnes y ont suffisamment cru pour en produire et/ou en percevoir objectivement (traces photographiques ou autres). D'où un effet boule de neige, qui finit à la longue par fondre au soleil de la raison mais qui renaîtra ailleurs sous une autre forme.
De façon générale, le psi peut être vrai (ou faux, càd inexistant) à deux niveaux successifs, ou être vrai à un niveau et faux à l'autre. (Cf. aussi chapitre 6 : ethnocentrisme.)
- Cas limites : s'observent dans des situations où est ignoré l'aspect significatif de l'existence, càd son aspect complémentariste. Ainsi la physique classique ignore le rôle de l'observateur et les événements à caractère intentionnel : ce qu'elle observe n'est jamais psi. A l'inverse, le rêveur baigne dans un univers magique : tous les événements, les personnages, le décor sont psi.

b. Autres définitions


L'introduction du finalisme dans la définition du psi ne tient pas à un a priori métaphysique, mais à une définition minimale. Un phénomène physique improbable mais non intentionnel ne relève pas a priori de la parapsy. L'intentionalité en jeu est une finalité intrinsèque au sujet considéré, immanente et subjective donc, et n'implique a priori aucune transcendance métaphysique. En assimilant (avec raison) le psi à la créativité, on peut effectivement parler de transcendance, mais dans un sens purement moral : il s'agit de se dépasser soi-même. La tâche du théoricien sera ainsi d'expliquer en quoi cette finalité immanente est capable de surdéterminer la causalité extérieure (pourtant globalement dominante, càd transcendante).
Or non seulement l'histoire humaine individuelle va du probable à l'improbable, du simple au complexe, mais aussi toutes les histoires : sociale, biotique et cosmique. D'où une question obligée pour le théoricien : tous les phénomènes intrinsèquement improbables ne seraient-ils pas psi ? Autrement dit, toute entité matérielle ne serait-elle pas douée d'intentionnalité ?

c. Ambitions de la parapsychologie


La parapsy se distingue catégoriquement de l'ésotérisme en ce qu'elle affiche une vocation exotérique, commune à toutes les sciences institutionnelles occidentales, et ne se cantonne pas dans une symbolique locale (comme on peut le voir dans le freudisme, avec sa clef des songes et sa psychanalyse didactique, et dans les occultismes de toutes sortes, fussent-ils "savants"). De tous temps, des hommes impartiaux ont tenté de comprendre les phénomènes réputés magiques ; d'où les extraordinaires progrès des sciences "objectives", au détriment bien sûr des études sur le sujet en lui-même et de tous les processus finalistes évidents. Une étude scientifique continue de ceux-ci (la première parapsychologie) ne remonte qu'à la fin du XVIIIe siècle. Elle a très vite éclatée en de multiples branches ( hypnotisme expérimental ; psychologie qualitative puis quantitative, confinée dans l'étude du comportement ou de la raison ; psychologie clinique, confinée dans celle du pathologique ; psychologie dynamique ; psychologie de l'imaginaire ; psychologie animale, etc.) qui, chacune, évincent tel ou tel aspect gênant de ces manifestations, eu égard au paradigme dominant -physicaliste, càd réaliste et objectiviste- de la science occidentale. Seule la parapsychologie contemporaine n'a rien renié du psychisme et tente toujours une approche globale de celui-ci.

La parapsy étudie les relations inhabituelles entre réel et imaginaire, et entre sujet et objet. Nous verrons que ces deux couples ne sont pas identiques mais complémentaires. Cet aspect fondamental se manifeste dans les buts que se donne cette discipline :
- Dans sa visée la plus générale, elle cherche à nous éclairer sur la créativité, les limites des sciences occidentales (càd les mythes sur lesquels elles se fondent et qui nous surdéterminent), la notion de sens, les différences entre loi (objective) et règle (subjective), la nature de l'espace/temps ;
- Dans sa visée la plus intime, elle entend, par une démarche à la fois physique et morale (qui déborde très largement la psychologie et la philosophie occidentales), modéliser de façon complémentariste les relations entre conscience et volonté, soi et autrui, l'individu et le groupe, le Moi avec lui-même.
Son but ultime, métaphysique, serait de dégager les principes complémentaires d'une destinée individuelle (quel que soit le niveau considéré) construite. Au niveau humain, le philosophe Jean Guitton a proposé une nouvelle discipline en ce sens, qu'il appella "tychologie" (de tuch : hasard).

Comment expliquer scientifiquement (rationnellement ou causalement) des faits qui n'en relèvent pas a priori ? La réponse est simple : la parapsy doit se plier à un déterminisme logique, par définition orienté (il relie prémisses et conséquences) et intemporel (en théorie du moins, puisqu'en pratique tout raisonnement opératoire demande du temps), mais qui ne relève pas du tiers exclu : cette logique doit être complémentariste (du tiers inclus).
La parapsy théorique se donne donc pour tâche première de décrire, puis de formaliser le déterminisme final propre à l'intention et, enfin, de formaliser les interférences entre finalité et causalité (la première surdéterminant localement la seconde dans tout processus psi), interférences complémentaristes puisque l'une se définit par rapport à l'autre, quantitativement ou qualitativement. Mais pour formaliser ces interférences, il faut évidemment que le langage décrivant le déterminisme intentionnel soit compatible avec celui du déterminisme scientifique habituel, càd de préférence logique (mathématique) plutôt que verbal (sciences molles), puisque le paradigme des sciences dures est la physique. Le moteur comme le résultat de ces interférences complémentaristes étant essentiellement affectif, la tâche dernière de la parapsy théorique ne peut être que d'ordre "poïétique" , dont tous les arts sont l'expression.

II. Terminologie


Le terme "parapsychologie", d'usage initialement américain, prévaut pour désigner cette discipline, car elle ne s'est massivement implantée que dans les universités américaines. Ce terme est inadéquat, car la discipline englobe et déborde l'ensemble des diverses écoles de psychologie, contredit les interprétations courantes des théories physiques contemporaines, nécessite une théorie sémantique générale (réputée impossible), nie la validité universelle de la théorie de l'information, conteste la portée métaphysique de toutes les logiques non complémentaristes, etc. Ce terme est également désastreux, car de nombreux praticiens du psi (voyants ou guérisseurs) ont repris le terme à leur compte sans avoir la moindre compétence scientifique et sans présenter de garanties déontologiques. D'où une équivoque entretenue dans le grand public par ces praticiens et relayés par les grands média (dont l'escroquerie est la principale ligne de conduite) aussi bien que par les détracteurs du psi (tous matérialistes ou rationalistes), enchantés d'une telle aubaine.

GLOSSAIRE

CIRCUIT PSI : c'est l'aspect dynamique de la situation psi, telle qu'elle est formalisée par l'auteur dans son modèle théorique (du même nom). Terme forgé en 1976. Ce modèle spatio-temporel distingue deux couples de complémentaires : objet/sujet et réel/imaginaire. Le premier couple intéresse l'orientation du temps (causal/final) et le second, celle de l'espace (introjection/projection).


ESP - n.f. : abréviation américaine de "extra-sensory perception". Terme générique proposé par Rhine pour désigner toute forme de connaissance psi. Classiquement, on oppose les ESP spatiales, télépathie (communion psi entre deux personnes) et clairvoyance (représentation psi d'un événement physique), aux ESP temporelles, précognition ou prémonition (connaissance psi du futur) et rétrocognition (connaissance psi du passé). En fait, toutes les ESP ont les mêmes propriétés psychologiques (d'où le terme général de GESP), et les modes de connaissance psi ne sont certainement pas perceptifs. C'est pourquoi l'on préférera le terme unique de percipience, que l'auteur a proposé en 1971.

OVNI - n.m. : abréviation d' "objet volant non identifié" (en anglais, UFO : "unidentified flying object"). Terme générique proposé par Ruppelt et désignant des engins présumés extraterrestres, communément dénommés "soucoupes volantes" depuis 1947. Comme toutes les apparitions, leur degré d'objectivation (directement liée aux croyances des protagonistes) est variable.

PARAPSYCHOLOGIE - n.f. : discipline étudiant les événements psi. Terme proposé par Dessoir en 1889. Principaux synonymes (par ordre historique) : magnétisme animal, somnambulisme ou hypnotisme expérimental, spiritisme (en anglais : "spiritualism") expérimental, recherches psychiques (en anglais, "psychic" désigne tout phénomène paranormal), paraphysique, métapsychique (pays latins), psychotronique, paranormologie, psychophysique (mais le mot a d'autres sens), recherche psi. L'appellation actuelle la meilleure, et la moins utilisée (sauf au Québec), est en fait celle proposée par L.Bélanger et G.Béney en 1978 : psilogie.

PK - n.m. ou n.f. : abréviation de psychocinèse (ou "psychokinésie"). Du grec kinhsiV, mouvement. Terme générique proposé par Rhine pour désigner toute impulsion psi. Cette action peut intéresser le corps du sujet (guérison inexplicable), celui d'autrui ou un matériau quelconque (solide, liquide ou gazeux ; macro- ou microscopique) ; d'où un effet PK ("animation" de la matière). Synonyme d'agence. Le rétro-PK désigne une action psi sur le passé ; et la télékinésie, un déplacement apparemment instantané d'objet à distance.

POLTERGEIST - n.m. : terme archaïque allemand ("esprit frappeur") désignant en français des effets PK variés, spontanés et répétitifs, rapportés le plus souvent à un adolescent. Synonyme de hantise de personne ou petite hantise (pour la distinguer des apparitions répétitives en un même lieu). Le terme allemand moderne est "spuk" ; le terme anglais est "RSPK" (recurrent spontaneous PK). Les raps (en anglais : "petits coups secs et durs") en constituent la forme la plus fréquente et la plus simple.

PSI - n.m. ou adj. (première lettre grecque de yuch, le souffle vital, l'âme) : désigne en pratique l'ensemble des coïncidences significatives entre un événement physiquement inexplicable et un désir plus ou moins conscient de le produire. Proposé par Thouless en 1942. Au sens habituel (restrictif), le terme désigne des événements objectifs extraordinaires en relation supposée avec une pensée. Synonyme de magique, paranormal et bio-information (Russie). En général, il s'agit d'une coïncidence significative "intrasubjective" (dont le type le plus parlant est la télépathie), que le sujet soit un couple, un individu, un complexe inconscient ou un groupe. La problématique psi ne fait donc que renvoyer au fondement, qu'on peut qualifier d'affectif, de la signification et de la communion. A ne pas confondre avec "psy" (n.m. ou adj.), qui désigne en abrégé un professionnel de la psychothérapie, ou ce qui y est relatif.

PSI-MISSING - n.m. (anglais) : désigne dans l'expérimentation statistique un résultat significativement inférieur à l'attente statistique. Terme proposé par Schmeidler en 1949. Attribué en général à l'incrédulité du sujet (consciente ou non) relative à la possibilité d'occurrences paranormales. Synonyme de psi négatif.

SITUATION PSI : situation affective (à la fois état et tendance) au cours de laquelle peut se produire un événement psi. Terme proposé par l'auteur en 1972. Les chercheurs américains parlent d' "autres états de conscience" ( et non altérés, selon une traduction fautive). Il s'agit en fait le plus souvent d'une situation très banale où le sujet est à la fois branché sur le monde extérieur et son monde intérieur, mais de façon paradoxale selon les conceptions de la psychologie de la conscience (hégémonique en Occident). C'est le cas, par exemple, lors du réveil qui suit un rêve et, plus généralement, lors de toute conduite automatisée (qui génère ipso facto une "attention distraite"). Cette situation se retrouve dans un couple affectivement uni, dans la communion de groupe, dans une foule et même dans une société (idéologie, religion, mythes). L'hypnose, la transe, le dédoublement de personnalité en sont des formes plus rares et plus impressionnantes.

SUJET PSI : toute personne éprouvant et/ou produisant fréquemment des événements psi. On distingue, dans les cas de télépathie, un agent et un percipient. Synonyme de médium, sensitif, paragnoste, etc.

III. Taxinomie

a. Ecoles américaine et française


Pour le grand public, le champ de la parapsychologie est flou et comprend approximativement l'ensemble des faits que la science met au rebut, faits invraisemblables ou impossibles. Comme nous l'avons dit précédemment, les événements psi sont des coïncidences significatives "provoquées" entre deux faits, que ceux-ci soient chacun conformes ou non à une loi. Une table qui lévite ne peut être considéré comme un événement psi que si un désir peut lui être associé ; sinon, il s'agit vraisemblablement d'un tour de passe-passe ou d'un tremblement de terre. Un rêve psi est le lien significatif qu'on repère entre le récit d'un rêve et un événement extérieur que le sujet ne peut présentement connaître ou contrôler. Dans tous les cas cependant, la transmission supposée n'est certainement pas liée à une énergie physique, et les percipiences ne sont certainement pas des "perceptions extrasensorielles" (détails dans le chapitre 2). Mais le fondateur de la parapsychologie statistique, l'américain Rhine, a imposé ce terme calamiteux : il est resté en usage chez ses successeurs et est pris au pied de la lettre par le grand public.
En somme, la classification américaine se fait selon deux critères :
- l'un, relatif à la nature supposée de la source : la télépathie renvoie au psychisme de sources vivantes, alors que la clairvoyance intéresse des sources purement physiques ;
- l'autre, temporel, relatif au moment supposé de l'émission : si celle-ci est approximativement simultanée à la percipience, on parle de clairvoyance ou de télépathie ; si elle est future, de précognition ; et passée, de post- ou de rétrocognition.
Il y aurait d'abord avantage à systématiser tout à fait le vocabulaire en introduisant, entre "rétrocognition" et "précognition", le moyen terme de percognition, pour remplacer l'ensemble habituel "clairvoyance-télépathie". Par ailleurs, on a parfois subdivisé cette classification selon le nombre de sources (on parle par exemple de poly-télépathie) et suivant que le percipient est son propre agent ou non (auto- ou hétéro-précognition, par exemple). Cette multiplication de termes résulte de l'hypothèse théorique rhinienne, très floue, selon laquelle ces phénomènes, tous différents, relèveraient d'organes sensoriels et moteurs inconnus, mais qu'on mettra tôt ou tard en évidence. Outre le fait que la transmission psi n'est certainement pas de nature objectivable, de nombreux cas spontanés ou expérimentaux ne rentrent pas du tout dans cette classification, soit qu'on y trouve associés différents types, soit encore que des types différents en rendent également compte, soit enfin qu'elle ne s'applique à aucun d'entre eux.

Bien qu'elle soit très incomplète et en partie erronée, voici une autre classification , proposée par le GERP, groupe français interdisciplinaire de chercheurs universitaires, et bien meilleure en tout cas que la classification américaine :

1) PSI SIMPLE : AGENT A -PERCIPIENT B
L'individu A peut être le même que l'individu B ; A et B peuvent représenter chacun un groupe d'individus.

a) Déterminisme psycho - psychique : la télépathie au sens large
- A une télépathie "percognitive" (immédiate) entre deux personnes correspond pour une seule personne une intuition, une impulsion corporelle ou une représentation imaginaire pure (sans aucun lien formel avec la réalité objective passée, présente ou future), considérées toutes trois comme "normales".
- Un souvenir ne s'oppose pas à une rétrocognition. Toute représentation imaginaire est une synthèse de souvenirs et de désirs. Quand on cherche seulement à se souvenir, seul apparaît le souvenir en question. La rétrocognition est une représentation imaginaire banale à laquelle on associe après-coup un événement inconnu. D'autre part, la mémoire psychophysiologique n'a strictement rien à voir avec une mémoire physique d'ordinateur : les souvenirs, de l'avis unanime des psycho-physiologistes (même matérialistes), ne sont pas des "engrammes" biochimiques, des configuration spatiales mais des configurations temporelles contingentes, sujettes donc à remaniement, effacement ou restauration ad integrum. Il est probable donc qu'une remémoration de souvenirs personnels, une représentation mythique ("archétypique" dans la terminologie psychophysiologique de Jung) et une rétrocognition (psi) ont des liens bien plus étroits que ne le supposent habituellement les parapsychologues expérimentalistes.
- Une création intellectuelle peut être assimilée à une auto-télépathie précognitive.

b) Déterminisme psycho <->somatique
- Ces phénomènes sont réversibles ou non : cas, par exemple, de maladies et de guérisons inexplicables. - On peut classer les anomalies somatiques selon leur degré de complexité :
. fonctionnelles (comme le contrôle néo-cortical des organes internes et de leurs rythmes, le somnambulisme ou l'écriture automatique),
. organiques (comme les stigmates dermiques ou viscéraux),
. structurales (comme les déformations du squelette ou les dématérialisations corporelles partielles).

c) Déterminisme psycho <->physique
L'entité physique en jeu ici est considérée implicitement comme une entité psychosomatique primitive ou indifférenciée. Quant à l'entité psychique, elle désigne le plus souvent un être humain, qui peut être alors :
- soit agent : le PK peut produire un effet matériel dans le présent, le passé ou le futur, càd une trace (physique ou physiologique) enregistrable ;
- soit percipient : la clairvoyance au sens large peut être également relative à un événément purement matériel présent, passé ou futur.

2) PSI COMPLEXE : par exemple LES APPARITIONS
Il s'agit d'hallucinations (temporaires par définition) qui peuvent être figuratives ou non (auras, fantômes, ovnis, apparitions religieuses, etc.) et associées ou non à une agence et/ou à une percipience. Elles peuvent être :
- subjectives et individuelles (hallucinations "normales" ou "paranormales"),
- subjectives et partiellement collectives (hallucinations de groupe), dont le degré d'objectivité est souvent paradoxal,
- subjectives et totalement collectives, càd objectives (on les appelle "ectoplasmies" ; ce sont des rêves photographiables).

b. L'approche de l'auteur


Non seulement la transmission psi n'est pas liée au transfert d'une énergie physique (ce sur quoi tous les parapsychologues s'accordent), mais elle n'est pas due non plus à un transfert d'informations (ce que tous les auteurs nient malgré le paradoxe, sauf moi).Nous y reviendrons au chapitre 2. Par ailleurs, le psi ne se cantonne pas aux humains, mais à toute entité matérielle cohérente : c'est en tout cas la thèse animiste que je défends (voir chap.6). De plus, il n'y a pas discontinuité mais continuité entre les phénomènes paranormaux et les normaux comme je le développerai ultérieurement (j'y ai déjà fait allusion en intro de I). Ensuite, un même événement sera ou non considéré comme psi selon le point de vue où l'on se place (cf. I.a) ; autrement dit, une classification qui ne se situe qu'au niveau de l'individu humain n'est certainement pas pertinente. Enfin, les paradoxes temporels qu'impliquent la prémonition et le rétro-PK macroscopiques, pourtant avérés, impliquent que c'est notre conception du temps et du hasard qu'il faut remettre en cause.

Dans mon modèle, toute percipience est due à une agence (alors que dans le modèle américain, on ne peut automatiquement lier ESP et PK). D'abord parce que tous les événements psi propres à une entité quelconque sont à son propre niveau "auto-" (et jamais directement "hétéro-") : la clairvoyance et la télépathie au sens "percognitif" de Rhine n'existent donc plus, mais seulement l'auto-précognition et l'auto-rétroagence. D'autre part, toute percipience se traduit par un effet PK physiologique ; car il est bien évident que, pour tout être vivant, un événement mental est nécessairement associé à un événement physiologique. Mon modèle implique qu'il en va de même pour une entité matérielle cohérente par elle-même (cas par exemple d'une particule) : son activité mentale se traduira nécessairement, au moins à notre échelle expérimentale actuelle, par un effet PK physique.

1. Les significations inhabituelles
Etant donné qu'il n'y a aucune différence psychologique entre les diverses ESP ou les diverses tentatives PK et qu'on postule un déterminisme entre les deux, il faut trouver un modèle psychophysique justifiant ces similitudes et décrivant cette détermination.

Le psi est par définition paradoxal : une prémonition peut être en effet niée en actes (moralement), tandis que le rétroPK -qui relève du paradoxe logique de l'ancêtre , cher à la SF- peut être nié en pensée. Or il existe effectivement des cas bien avérés de prémonitions d'accident assez détaillées pour que le sujet les évite. De plus, les effets PK d'apparence instantanée peuvent être interprétés, au moment de l'agence, comme la trace d'effets nouveaux passés, d'autant plus que certains effets PK apparaissent expérimentalement avant la tentative PK du sujet et qu'un effet PK supposé postérieur à l'agence peut être en fait simplement dû à une agence retardée (une agence n'est pas toujours volontaire) ou au caractère lent de l'effet. Bien entendu, la quasi-totalité des parapsychologues, par conformisme ou incohérence théorique, ne veut pas mettre les paradoxes temporels au coeur de la problématique de leur discipline.

Une critique qu'on peut faire de la classification américaine est que le domaine de la parapsychologie est composé d'événements (uniques) et non de phénomènes (reproductibles). Or la catégorie événementielle est particulièrement pertinente en histoire et généralement dans toute systématisation de l'imaginaire (par nature créatif). Ce qui n'interdit donc pas au scientifique de concevoir des théories de l'improbable (par exemple le lamarckisme en biologie, le principe anthropique en cosmologie, l'individuation jungienne en psychogenèse), théories où l'on pourra retrouver des invariants nouménaux. Mais, en général, les approches quantitatives de l'évolution ne nous éclairent pas sur son déterminisme, non par un vice intrinsèque à la méthode mais par le conformisme de rigueur chez les chercheurs (ce sont presque tous des fonctionnaires), dans leurs choix a priori et leurs interprétations a posteriori.

Toutes les sciences circonscrivent un champ d'investigation dont le centre est occupé par les phénomènes les plus fréquents. Le champ de la parapsy devrait au contraire, bien que ce ne soit pas l'usage, placer en son centre les "phénomènes" psi les plus improbables, càd des événements impossibles (qualitativement ou qualitativement) d'un point de vue cognitif. Pour justifier une telle démarche, on peut rappeler que, si on compare les sciences an-historiques (celles du réel pur, de la nature immédiate), la physique quanto-relativiste est la seule à étudier en absolu (à l'échelle de l'univers) des phénomènes fréquents. Plus la science est spécialisée, plus son domaine est improbable par rapport à la physique : biologie sociologie psychologie. Dans les sciences de l'évolution, dites historiques ou morales (où l'imaginaire surdétermine le réel), c'est au contraire dans la psychogenèse humaine où l'on trouve les événements les plus rares (le génie par exemple, irréductible à toute causalité). La psychologie génétique de Piaget, structurale, a repéré des niveaux pertinents d'évolution, au moins pour la pensée occidentale ; mais elle ne dit strictement rien de sensé -comme le darwinisme- sur les passages d'un niveau à l'autre, càd sur les mutations . La parapsychologie ne s'intéresse au contraire qu'à elles. C'est donc cette dernière discipline qu'on peut considérer comme le paradigme des sciences historiques ; et sans elle, jamais la physique cosmologique ne parviendra à une théorie unitaire des forces recensées dans l'univers, càd à expliquer l'histoire de celui-ci.
Autrement dit, ce qui est pertinent en histoire, ce sont les cas spontanés rares, qui ne peuvent se présenter que sous forme de récits (puisqu'un événement psi n'est pas reproductible, la preuve ne peut être que testimoniale), un récit étant l'équivalent subjectif et temporel, le complémentaire symbolique d'un objet. Un tel point de vue, radical, exclut l'essentiel de la parapsy expérimentale, qui vise presque toujours -en vain- la reproductibilité, au lieu de se préoccuper de théorie. (Et quand elle s'occupe de théorie, ce n'est jamais sur l'ensemble des phénomènes, mais seulement sur une partie d'entre eux quand ce n'est pas sur un seul : ainsi de la clairvoyance interprétée, en termes d'information, par une sorte de radio mentale captant des signaux instantanés, ce qu'exclut la physique actuelle). Qualitativement, l'aspect le plus visiblement aberrant des événements psi est évidemment l'inversion temporelle qui nie le principe sacro-saint de la causalité physique (le plus grand mythe occidental). Il s'agirait donc de placer au centre du champ parapsy tous les phénomènes à franche inversion temporelle (paradoxaux par nature pour ce paradigme scientifique ; surtout dans leurs variantes actives, puisqu'elles entraînent une modification du passé physique). Ces phénomènes étant apparemment minoritaires dans la réalité que nous observons, se pose la question quantitative suivante : quelle est l'ampleur maximale de ces phénomènes ? Une réponse permettrait de préciser les limites de ces aberrations cognitives. (Voir chapitre 2.)


2. Les significations en général
Le complémentaire subjectif des événements physiquement improbables (anormaux) est l'ensemble des événements spirituellement prévisibles (anormaux du point de vue spirituel strict). Ainsi une mémoire trop envahissante peut limiter très gravement la créativité naturelle de l'imaginaire ; le rationalisme et toutes les maladies mentales à fonctionnement dominant "causal" (névrose phobo-obsessionnelle, paranoïa, etc.) la détériorent gravement.

La distinction entre significations normales et paranormales varie selon les individus et chez un même individu. On doit de plus tenir compte du niveau considéré. Par exemple, ce qu'on appelle télépathie au niveau interindividuel est l'équivalent normal d'une situation mentale du couple pris comme entité de référence (intuition, souvenir, projet, rêve banal, etc.).

Les classifications scientifiques passent généralement par trois stades. Le premier est purement pragmatique : il s'agit de recenser le plus commodément les phénomènes observés à l'intérieur du domaine (on va par exemple classer les minéraux selon des valeurs à la fois symboliques et d'usage). Les synthèses expérimentales (ou théories "causales" partielles) permettent ensuite de faire des regroupements plus abstraits (ainsi de la table de Mendéleïev). Une théorie générale du domaine, le plus souvent causale, permet enfin de tout classifier selon un ordre génétique, "réductionniste" (ainsi, en physique quanto-relativiste, on classera les entités matérielles selon leur niveau d'élémentarité).
En morale comme en politique ou dans les religions, càd dans une grande partie des sciences dites humaines (qui s'appelaient d'ailleurs encore "morales" il n'y pas très longtemps), les classifications sont en principe finales, càd ordonnées selon un Bien absolu (avoué ou non) situé dans l'avenir.
En Occident, les diverses histoires (cosmique, biotique, sociale ou individuelle) sont fondées sur l'idée objectiviste de progrès matériel ou économique, de complexification progressive, qui néglige l'aspect consensuel, démocratique de la pérennité d'une structure au profit d'une élite éphémère. Les deux classifications temporelles de base, causale et finale, interfèrent donc ici : la chronologie (s.-e. passée) est apparemment respectée, mais le chercheur sélectionne en fait dans l'infinité des événements révolus ceux qui lui conviennent moralement. Ainsi l'histoire (la mémoire) est continuellement reconstruite en fonction de l'idéologie régnante, càd des fins qu'on se donne. Les événements significatifs choisis sont souvent appelées "mutations" : ce sont stricto sensu (bien que le mot ne soit pas utilisé) des événements psi.
Les sciences dures font tout pour escamoter ces choix subjectifs : c'est le hasard, déifié, qui explique cette complexification progressive (ainsi du hasard essentiel en cosmologie, en physique quantique ou dans le modèle darwinien) et l'on s'en tient à une classification prétendument objective puisque "causale". Si deux animaux vivant dans une niche écologique similaire se ressemblent beaucoup mais n'ont pas du tout le même patrimoine génétique (processus dit de convergence), on les classe séparément (le hasard étant mystérieusement devenu entre-temps un artefact) alors qu'on pourrait concevoir une classification fondée explicitement sur des convergences finales (le hasard étant exclu), càd sur une chronologie future.
Par ces divers exemples, on peut comprendre comment devraient être classés les divers événements psi. Aucune classification ne peut se prétendre "causale" puisqu'elle est surdéterminée par des fins (qu'elles soient empiriques, rationnelles ou théoriques). Tout classement interdit l'évacuation du hasard, tout classement est déjà en soi un processus psi. Une bonne classification des faits psi suppose donc une maîtrise complète de la complémentarité , càd un affichage non équivoque du ou des partis pris finalistes de l'auteur. Je pense que, dès ce premier chapitre, les lecteurs auront compris que son auteur est un irréductible anarchiste et qu'il va devoir s'en justifier au nom même de la parapsy qu'il prône.
Une manière proprement métaphysique de faire un seul classement à partir des deux précédents consiste à appréhender le domaine de façon holistique et topologique : ainsi du "bootstrap topologique" pour la physique des particules et du circuit psi (cf. ci-dessous) pour les significations en général, dont la circularité implique une philosophie écologiste (anti-hiérarchique, anti-transcendantale, càd immanentiste).

Le schéma topologique du circuit psi se caractérise par une complémentarité binaire de tous les concepts, y compris du moi. Sans entrer ici dans les détails, ce schéma implique, entre autres :
- une conception de chaque moi réel sous la forme spatiale (durable) d'un schéma corporel et une représentation du moi imaginaire correspondant sous celle, temporelle (variable), d'une image de soi ;
- une circularité spatio-temporelle et une non-prédictibilité objectiviste. Contrairement à un opinion très répandue, une théorie scientifique -même mathématisée- d'un certain domaine de la réalité objective peut être purement descriptive. René Thom, médaille Fields et l'un des plus grands épistémologues contemporains, a fortement insisté sur ce point ;
- une inversion temporelle dans le monde des intentions (celui de la pensée, de la subjectivité) ;
- un écoulement obligé du temps dans le monde réel (actuel) : du passé objectif, via maintenant (posé comme repère fixe), vers le passé subjectif. Et, inversement, un écoulement obligé de l'espace dans le monde imaginaire (potentiel) : de l'ailleurs subjectif, via ici (posé comme repère fixe), vers l'ailleurs objectif ;
- une application possible de ce schéma à un "complexe inconscient" (à un Moi secondaire, voire à Soi) aussi bien qu'à la société (à Autrui), mais généralement avec inversion temporelle (causal/final) et spatiale (introjection/projection) par rapport au moi global individuel.


SCHEMA DU CIRCUIT PSI reproduit dans le Forum interdisciplinaire N°1, p.169


Le mythe occidental d'un temps objectif que nous parcourrions du passé vers le futur correspond à une rupture de ce circuit, motivée par la négation du Moi individuel en tant que repère absolu. La plupart des modèles en sciences humaines n'échappent pas à cette linéarité : les déterminismes subjectif et imaginaire sont réduits a priori à la causalité ou à la raison.


IV. Méthodologie


Inutile de s'attarder sur le problème de la preuve : on ne peut rationnellement prouver une signification particulière et c'est votre droit de ne pas aimer Picasso. Par contre, nul ne peut se dispenser de preuves testimoniales, même les psychotiques. Et, chez tout être vivant, la croyance (qui est un pari actif sur l'avenir) est également constitutive de la signification, qu'elle soit active ou perceptive.

Outre le problème de la preuve, il y a celui des rapports entre esprit et corps que nous n'aborderons pas ici : voir sur ce thème la discussion épistémologique au chapitre 2 et la discussion philosophique au chapitre 6. Il est cependant d'ores et déjà clair que si la parapsy utilise toutes les méthodes scientifiques disponibles, sa méthode spécifique consiste :
- à prouver que telle coïncidence, spontanée ou produite expérimentalement, est bien psi. En laboratoire comme sur le terrain (études par exemple de poltergeists), il va de soi que l'équipe de chercheurs et le sujet psi doivent créer entre eux des relations empathiques, symbiotiques, mais aussi se mettre dans un état de "réceptivité créatrice". Il n'y a pas et il n'y aura jamais de techniques pour cela. (Sur la créativité, voir chapitre 4 et 5) ;
- à cartographier le domaine en l'explorant (nouveaux événements, limites) ;
- à tester des modèles théoriques (puisqu'aucun ne fait l'unanimité).

Toutes les sciences se donnent pour tâche de corréler des données d'observation (supposées objectives) et des théories (subjectives) : elles créent ainsi de nouveaux champs de signification. Les données d'observation peuvent être, en raison du niveau où l'on se situe, considérées à bon droit comme strictement objectives. Les "objets" qu'étudie la physique classique sont manifestement dénués de toute intentionnalité. Il en va de même pour les autres sciences dites "dures", matérialistes dans leurs approches puisqu'elles n'étudient que des relations causales. Il n'en va pas de même pour les sciences molles et la parapsy, qui étudient des relations de signification entre intention et information, signifié et signifiant. Si certains théoriciens de sciences humaines évacuent le sens en se ralliant à une métaphysique purement matérialiste, cette position est interdite en parapsychologie puisqu'alors on sort immédiatement de son champ (précédemment défini). Autrement dit, la recherche parapsychologique implique une position métaphysique (donc logique, physique, morale et esthétique) a priori complémentariste, faute de quoi on parle ou on expérimente dans le vide.
Toutes les métaphysiques partent de cette évidence première que chacun de nous a un corps et est un être pensant. Quid de cette chimère ? Cette problématique sera développée dans les cours 2 et 6. Rappelons qu'on peut classer les métaphysiques en trois catégories :
- moniste : un principe fondamental. Par exemple, une substance fondamentale (la matière) ou un processus fondamental (l'esprit),
- dualiste : deux principes antagonistes. Généralement les deux précédents : l'un spatial et objectif, l'autre temporel et subjectif,
- complémentariste (X principes complémentaires).

a. Les procédures habituelles


La parapsy habituelle (non théorique) se donne pour objectif d'observer, de recenser ou de produire des événements psi, de les analyser et, éventuellement, de les reproduire. Pour affirmer qu'un événement est psi, on compare deux séries objectivement indépendantes : 1) les déclarations d'intention du sujet (évidemment conformes au protocole, en cas d'expérience) et 2) les données relatives à la source (en cas de percipience) ou à la cible (en cas d'agence) présumées.

1. qualitatives
En tant qu'événement, le psi ne peut relever que de la preuve testimoniale et sa signification, que d'une appréciation subjective. Néanmoins la preuve testimoniale n'est pas une preuve "au rabais". C'est la seule dont on dispose en histoire, càd à propos du vécu d'autrui, ce qui couvre un domaine infiniment plus vaste que celui des sciences dures an-historiques. Beaucoup de "réalistes" -rationalistes et/ou matérialistes- la rejettent.
Sans même parler de métaphysique, on peut considérer d'un point de vue psychiatrique qu'il s'agit là de prépsychotiques. Car si ces gens allaient au fond de leurs convictions, ils douteraient aussi de leur propre mémoire. Mais ils répliquent, pour valider leur point de vue, qu'eux seuls sont efficaces et donc à la pointe de la civilisation. Foin du passé : la civilisation occidentale en est effectivement arrivée à déterminer tout l'avenir par le seul rendement économique. Ces réalistes sont des gagneurs. Quand ils auront gagné, tout le monde sera mort, eux et la Terre compris. Vivement que les peuples les pendent !
On peut ainsi juger du degré de perversité intellectuelle d'un Jean-Claude Pecker, physicien, professeur au Collège de France et vieux croûton rationaliste, qui, dans la même foulée médiatique, dénie les phénomènes psi et s'insurge contre les révisionnistes de l'holocauste ! Il est vrai cependant qu'indépendamment des témoignages, le déterminisme est le même dans les deux cas.

Parmi les méthodes qualitatives (applicables aussi bien aux cas expérimentaux que spontanés), certaines sont devenues anecdotiques (comme la transmission de dessins), car on a déjà tout tiré de pareilles expériences. Les plus riches d'enseignement relèvent de la psychanalyse et de l'ethnologie.

2. quantitatives
La preuve statistique a atteint un niveau obsessionnel tant chez les expérimentateurs de l'école rhinienne que chez leurs détracteurs. Il ne s'agit pas pour autant de rejeter en bloc les statistiques. Il faut au contraire bien avoir en tête la nature des probabilités, dites objectives quand tout le monde détient a priori les mêmes connaissances, et subjectives dans le cas contraire. (Un témoin à qui le juge reprochait de dire du bien de l'accusé parce qu'il était son ami, répondit : "Et pourquoi ne serait-il pas mon ami parce qu'il y a du bien à en dire ?") Le tort majeur des expérimentalistes est de n'avoir aucune réflexion de fond sur la nature du hasard, dont ils n'abordent que le versant cognitif. Et c'est pourquoi ils aspirent quasiment tous à la reproductibilité, ce qui est auto-contradictoire selon la définition que j'ai donné du psi au début, et qui, de toute façon, est une conception moralement douteuse et philosophiquement intenable (voir chap.6), même si elle sous-tend explicitement la majorité des travaux psychologiques. Moralement douteuse : si vous proposez des travaux qui ont des chances d'applications techniques, vous avez à peu près 99,99% plus de chances d'être agréé que si vous proposez des travaux dont les applications seront éthiques ou esthétiques (et sans rapport a priori avec l'idéologie ambiante), le financement étant bien sûr en proportion.

Les expérimentalistes prétendent obtenir une certaine reproductibilité. Certes des méta-analyses sur des types d'expérience ou des personnes permettent d'observer une certaine continuité des résultats paranormaux. Mais nous le savions déjà : à un moment judicieusement choisi, il est évidemment probable qu'un grand ballet ou un grand sportif reproduiront leurs performances. Mais il ne s'agit pas là de reproductibilité automatique, "technique" : seulement du maintien d'une certaine créativité. Or, sans faire ici allusion aux mutations historiques (toujours événementielles), nous verrons dans les chapitres suivants qu'il existe une reproductibilité automatique de phénomènes réputés normaux -sortant donc du cadre rhinien-, qui s'avèrent pourtant contredire le principe de causalité (expérience de Libet, chapitre 2 ; naissances après les guerres, chapitre 3 ; etc.).
Autrement dit, les méthodes les plus intéressantes ne viennent plus du tout -si jamais ce fut le cas- de la parapsychologie expérimentale (trop conformiste, par souci de respectabilité scientifique ; fascinée par la technologie ; enferrée dans ses contradictions), mais des autres sciences.

3. associées
Une méthode quantitative qui n'est pas associée à une méthode qualitative (ou vice versa) n'apporte guère d'informations au chercheur. Un exemple parmi mille est l'ensemble d'expériences rigoureusement menées par le physicien Crussard qui fit tordre des barres de métal à un sujet nommé J.P.Girard. Au microscope électronique, les déformations impliquaient que tantôt la force venait de l'extérieur tantôt de l'intérieur. Le minimum eût été de demander au sujet s'il agençait la barre de l'extérieur ou de l'intérieur. De telles expériences ont un intérêt médiatique évident ; parapsychologiquement parlant, l'intérêt est nul puisque la réponse à la question (non posée) était déjà connue .
Certains chercheurs ont associé intelligemment les méthodes qualitatives et quantitatives. Mais les uns (comme Bender) n'ont fait aucun lien complémentariste entre les deux ; et les autres (comme Janin, avec son "tychoscope" ) l'ont fait, mais leurs observations ont invalidé leurs hypothèses, trop partielles ou partiales, de départ.

b. La méthode de l'auteur

Une certaine tendance actuelle des sciences veut qu'une théorie ne soit valide qu'à un certain niveau. Mais, dans une perspective complémentariste :
1) la même théorie doit pouvoir s'appliquer à des niveaux différents de disciplines du même type. C'est le cas de la physique quantique qui couvre tout le champ (du micro- au macroscopique) de la matière qui nous environne, y compris ses propriétés chimiques . Le fait par contre que chaque science humaine contienne des modèles incompatibles entre eux et souvent même antagonistes, ou qu'aucun modèle psychologique, par exemple, ne soit homologue d'un modèle sociologique ou historique, prouve bien que ces disciplines n'ont pas trouvé de statut scientifique adéquat à leurs ambitions.
2) Mathématiques mises à part (nous y reviendrons au chapitre 2), la physique théorique moderne, paradigme des sciences de la nature, tend à recouvrir -du fait du scientisme ambiant- tout le champ des autres sciences. Sur le plan moral, les physiciens ne font même plus semblant de se battre ; la responsabilité des applications militaires ou ultra-libérales des découvertes étant laissées à la bienveillante appréciation des gouvernements, tous maladivement obsédés par leur extension économique qu'ils soient de droite ou de gauche. La bataille s'est, sur le plan moral, déplacée en biologie. Ne visant plus désormais qu'à l'efficacité, celle-ci culpabilise à son tour et instaure, comme les physiciens il y a 50 ans, des comités d'éthique. Vaste foutaise, puisque c'est l'argent qui décide et qu'il n'y a, revendiqué par ces "sages", aucun lien de complémentarité (pas plus que jadis) entre logique et morale. Ma conclusion est que la démarche d'un parapsychologue doit être réductionniste et complémentariste : mon unique hypothèse de l'inversion temporelle réduit l'essentiel des phénomènes psi à une simple relation de fin à moyens, réintroduit de plein droit en sciences la finalité, donc la morale, et permet d'interpréter de manière "complète" (objective et subjective, réelle et imaginaire) la physique quanto-relativiste.
3) L'approche complémentariste ne saurait se limiter à la science. La morale et l'art relèvent majoritairement de la finalité. Toute forme de créativité aussi. D'où l'impératif de transdisciplinarité : quels sont les liens entre science, art et morale ? Nous développerons cet aspect au chapitre 8.
La méthode de l'auteur est toute entière fondée sur l'idée de complémentarité. Cela signifie qu'en pratique, on doit utiliser deux méthodes à la fois, incompatibles en apparence (principalement causale/finale et spatiale/temporelle). Plus concrètement :
- Aux méthodes cognitives (historiques, comme le freudisme), il faut adjoindre les méthodes conatives (prospectives, comme le jungisme ; morales ; heuristiques ; etc.). Autrement dit, le chercheur doit être lui-même sujet psi, ce qui invalide la démarche de la plupart des parapsychologues expérimentalistes, qui ne cherchent de leur propre aveu qu'à se persuader de l'existence "objective" du psi ou d'en rechercher des applications automatisées ;
- Une théorisation de l'imagination et de ses manifestations créatrices ne peut s'appuyer que sur une recherche empirique de témoignages improbables. Il faut donc fouiner dans les domaines les plus divers : non seulement les ouvrages plus ou moins directement de parapsychologie (principalement des recueils de cas spontanés), mais aussi les livres les plus divers (littérature, sciences, biographies) et tous les arts. Le psi ne se limitant pas à la production d'événements psi "orthodoxes" (ceux répertoriés par l'école rhinienne), il faut, complémentairement à l'acquisition de connaissances dans une certaine discipline, exercer créativement celle-ci. Autrement dit, n'importe quelle discipline peut être l'occasion de faire de la parapsychologie. Y compris, et surtout, celle s'obligeant à donner du sens à son existence.
En bref : pour apprendre à nager, il faut d'abord nager.



B. PRATIQUE


CAS SPONTANES ET EXPERIMENTAUX


1. GESP : Alors qu'elle était en première année d'université, une femme, qui vit actuellement en Géorgie (EU), fit un rêve si " réel " qu'elle ne l'a jamais oublié. "Ce rêve, raconte-t-elle, se déroulait autour d'une grande maison, très belle, entourée d'une haute grille et proche du trottoir public. Une garden-party s'y déroulait avec, d'un côté de la pelouse, les adultes, et de l'autre la jeunesse. Parmi celle-ci, je remarquai mon flirt attitré et, avec lui, un garçon aux cheveux noirs, qui me tournait si bien le dos que je ne voyais pas son visage. Cette fête me paraissait avoir lieu de nuit, mais tout était illuminé a giorno. Pendant ce temps, un homme en chapeau et costume noir allait et venait sur le trottoir, regardant à travers la grille. Je me suis alors réveillée subitement en me disant inexplicablement : " Je sais que cette maison se trouve à W. (une ville voisine) ".
Le lendemain, je racontai l'histoire à mon flirt qui me parut aussitôt très excité ; il me déclara que cette fête avait effectivement eu lieu trois ans plus tôt et qu'il l'avait presque oubliée. Il m'emmena voir la maison : elle était exactement comme dans mon rêve. Il me précisa aussi que l'ami qui l'accompagnait était John, que nous connaissions tous deux, et que des projecteurs avaient illuminé la pelouse pendant toute la durée de la soirée. Mais il ne se rappelait pas avoir remarqué un homme en noir qui allait et venait le long du trottoir. Un an plus tard, je fis la connaissance de la jeune fille qui vivait dans cette maison et qui me confirma ma vision. Et un an après,je rencontrai l'homme mystérieux de mon rêve : à l'époque de la fête et lorsque j'avais rêvé, il vivait dans une autre ville ; mais quand nous nous sommes rencontrés, il habitait la maison située de l'autre côté de la rue, juste en face de celle du rêve. Cet homme est devenu mon mari." (L.E.Rhine, Les Voies secrètes de l'esprit, Fayard, 1970, p.48).
Commentaire : Remarquer les aspects complémentaires du scénario.
2. Prémonition préventive réussie : Au début du siècle, aux Etats-Unis, une jeune institutrice, venait d'apprendre à conduire. Ses collègues préparaient une excursion à un lac distant d'environ 130 kilomètres. Plusieurs voitures devaient y participer, et on demanda à la jeune fille d'emmener quatre passagers. Bien qu'assez nerveuse à la pensée de la responsabilité qu'elle allait assumer, elle accepta. On convint qu'elle suivrait l'une de ses amies, Anne, qui connaissait la route. La nuit qui précéda ce pique-nique, un rêve atroce réveilla la jeune fille. Elle s'était vue derrière la voiture d'Anne sur une route de campagne qui devenait rapidement de plus en plus mauvaise. La route s'enfonçait soudain dans un ravin , sa pente s'accentuait ; et, au pied de la falaise, juste devant une muraille de rochers, il y avait un virage à angle droit. Dans son rêve, elle avait l'impression de sentir le brûlé : les freins ne tiendraient pas ! Et elle s'était réveillée très angoissée.
Aussi, le lendemain matin, avant de prendre le petit déjeuner, elle raconta son rêve à ses collègues et, malgré leurs moqueries, déclara qu'elle n'avalerait pas une bouchée avant qu'on lui explique ce qu'elle devrait faire dans une pareille circonstance. Elle alla finalement trouver un voisin qui lui conseilla de passer alors en marche arrière.
Elle partit, et tout alla bien pendant une heure. Elle suivait comme prévu la voiture d'Anne. Puis cette dernière signala l'approche d'une bifurcation. Aussitôt après, la route devint mauvaise, et il ne fut bientôt plus possible de faire demi-tour. Ils dévalèrent alors une pente raide, droit sur une falaise avec, en bas, un virage à angle droit. D'un seul coup, elle sentit une odeur de caoutchouc brûlé, et ses freins lâchèrent. Après avoir hésité une fraction de seconde, elle appuya sur la pédale qui, dans ce modèle, commandait la marche arrière, et prit le terrible virage sans accident. On découvrit alors qu'Anne s'était trompée de route et qu'ils s'étaient tous engagés sur un vieux chemin abandonné. (Idem, p.230)
Commentaire : ce cas très révélateur a le seul défaut de ne pas montrer l'accident pendant le rêve. Peut-être parce que la jeune fille serait morte. Dans d'autres cas préventifs relatifs à un tiers, nombreux, l'accident est vu dans son entier au cours du rêve. Remarquer que l'imagination fonctionne partout sur le mode conditionnel et que le paradoxe n'existe que pour un modèle "réaliste" de la mémoire. Il est pourtant bien évident que seul le présent (à l'indicatif) est réel. Pour une discussion détaillée de tels cas, lire F.Favre, "Le Modèle de l'auto-prémonition", in Revue de parapsychologie, 1982, 14.

3. Expérience de rétro-PK : Un générateur de hasard produit une série aléatoire à to+1, qui ne sera lue qu'à to+5 (par exemple quatre jours plus tard). A to+4, un sujet psi tente de rétro-agencer le générateur conformément à une série de températures relevées dans la rubrique météo d'un journal du jour et que le sujet n'est pas censé avoir pu agencer (du fait d'un contre-PK collectif). A to+5, la lecture comparée de la série du générateur et de celle de la météo montre une forte similitude qu'on interprète comme un effet rétro-PK. (P.Janin, "Psychocinèse dans le passé ?", in Parapsychologie, 1976, 2)
Commentaire : On peut critiquer cette expérience en supposant, par exemple, que le médium avait fait inconsciemment, en to , une clairvoyance prémonitoire de la rubrique météo, puis un PK "causal" sur le générateur ; la clairvoyance prémonitoire néanmoins, démontrée sans conteste par d'autres expériences, prouve à elle seule un effet rétro-PK sur le corps du sujet psi. Pour une discussion détaillée, voir F.Favre, "le modèle de l'auto-prémonition", op.cit., et "Animisme et espace-temps", in Forum transdisciplinaire N°1, 1995.

4. Poltergeist : Le cas suivant s'étendit sur deux ans, mettant en cause un adolescent, fils adoptif d'une famille indienne résidant à Poona. Mlle Kohn, professeur logeant dans la famille avec sa soeur, en fut le rapporteur. Un certain jour, les deux soeurs comptèrent des oeufs et les mirent dans un panier qu'elles enfermèrent dans un placard. A peine s'étaient-elles éloignées qu'un oeuf venant du côté du placard vola à travers la pièce, passant tout près des jeunes filles et alla s'écraser sur le sol. Elles regardèrent dans le placard et constatèrent qu'il manquait un oeuf. Le phénomène se reproduisit cinq fois de suite. Puis le panier, avec ses 42 oeufs, disparut du placard.
En d'autres occasions, les jeunes filles virent tomber des pièces de monnaie : "Au début, nous ne voyions pas toujours les pièces en l'air mais seulement au moment où le son de leur contact avec le sol nous faisait tressaillir. En tentant d'observer plus précocément le phénomène, nous vîmes apparaître les pièces de monnaie directement dans l'air." (Psychic Research, mai 1930)
Commentaire : Si la plupart des parapsychologues interprètent justement le poltergeist comme la solution à un conflit qu'un adolescent ne peut exprimer somatiquement (par un acte symbolique), l'école expérimentale ne fournit pas la moindre explication des disparitions (et des translocations) instantanées d'objets, dont elle parle d'ailleurs presque toujours avec réticence. Selon mon modèle, quand un objet disparaît spontanément d'une armoire fermée, c'est qu'il n'a plus été mis dans l'armoire.

5. Psi croisé avec apparition : "Il y a quelques temps, ma femme rêva plusieurs fois d'une maison dont elle pouvait décrire l'arrangement intérieur dans tous ses détails, bien qu'elle n'eût aucune idée du lieu où cette maison pouvait exister. Quelques années plus tard, j'envisageai de louer pour l'automne une demeure de Lady B., située dans les montagnes d'Ecosse et que je savais environnée de terrains de chasse et de lacs poissonneux. Mon fils, qui était alors dans la région, s'occupa de la location sans que ma femme et moi n'eussions jamais vu cette demeure.
Quand, ultérieurement, j'y vins seul pour signer le contrat, Lady B. y habitait encore. Elle me dit que si je n'y faisais pas objection, elle me mettrait dans une chambre agréable qu'elle-même avait occupée, mais qui était encore hantée de temps à autre par une femme inconnue. Etant tout à fait sceptique à ce sujet, je répondis que je serais enchanté de faire la connaissance du fantôme. Je dormis fort bien et n'y vis aucun spectre.
Ma femme arriva plus tard. Elle fut stupéfaite de reconnaître la maison de ses rêves et la parcourut presque en entier : tous les détails correspondaient. Mais quand elle redescendit dans le salon, elle déclara : "Pourtant, dans mes rêves, j'ai vu à tel endroit des chambres qui ne semblent pas y être en réalité". On lui répondit que ces chambres existaient bien, mais que l'on ne pouvait y accéder que par le salon. On alla les voir, et elle les reconnut parfaitement. Elle ajouta cependant que, dans ses rêves, l'une des chambres, qu'elle désigna, n'était pas à coucher. On lui expliqua que cette chambre venait effectivement d'être transformée.
Deux ou trois jours plus tard, ma femme et moi rendîmes visite à Lady B., qui poussa aussitôt un cri d'étonnement : "Mais vous êtes la dame qui hantait ma chambre à coucher !" (Revue des études psychiques, 1902).
Commentaire : On remarquera là encore la symétrie quasi parfaite de ce cas. En particulier, Lady B. ne perçoit que le fantôme de Mme H., et celle-ci n'imagine que la maison de Lady B. Suivant mon modèle, il s'agit en fait de deux auto-prémonitions complémentaires, celle de Lady B. relative à sa première rencontre avec Mme H., et celle de Mme H relative au récit qu'aurait pu lui faire Lady B. de l'ancien état de la maison. La simultanéité, comme le montrent beaucoup d'autres cas spontanés, n'est qu'un élément du scénario ultérieur commun. Pour plus de détails, consulter "Le Modèle de l'autoprémonition", op. cit.

6. Clairvoyance percognitive expérimentale : L'expérience quantitative princeps fut mise au point par Pratt et Woodruff. Le protocole en est le suivant : cinq cartes-solution (dites de Zener, d'usage courant à l'époque et représentant chacune un symbole différent) sont disposées devant le sujet psi, tandis qu'un paquet de cartes (battu de façon aléatoire et retourné de telle sorte que personne n'en pouvait avoir vu l'agencement) se trouve devant l'expérimentateur. Le sujet, qui ne verra jamais le paquet durant l'expérience, désigne alors la carte-solution qui correspond selon lui à la première carte-cible (toujours retournée) du paquet ; et ainsi de suite jusqu'à épuisement du paquet. (Journal of Parapsychology, 1939, 3).
Commentaire : Divers PK étaient possibles ; mais, en toute hypothèse, ils auraient supposé, suivant Rhine, une faculté associée de clairvoyance, la télépathie percognitive étant exclue. La précognition l'est également, toujours selon Rhine, puisqu'en détruisant l'ordre initial du paquet, le sujet s'interdit toute ESP précognitive ; autrement dit, le sujet doit d'abord s'engager matériellement pour tenter ensuite une précognition, qui ne serait alors qu'une conséquence de son engagement et non sa cause.
Les voyances n'étant pas des perceptions et les prémonitions préventives montrant qu'on peut effacer un événement futur, le raisonnement de Rhine n'est pas valable. L'interprétation la plus simple est alors une auto-prémonition (toujours télépathique et relative à un événement virtuel, par définition). Pour plus de détails, consulter "Le modèle de l'auto-prémonition", op.cit., p.21-24.

7. Télépathie percognitive expérimentale : La première expérience quantitative rigoureuse a été menée par Mac Mahan. Il fallait concevoir le protocole de telle façon que l'agent ne fît jamais du choix de son symbole aucun enregistrement matériel que la clairvoyance, même précognitive, pût atteindre. L'agent Mac Mahan choisit des cartes Zener selon un code aléatoire (par exemple la première lettre de chaque vers d'un poème) connu d'elle seule, mais tel qu'une autre personne puisse le comprendre et contrôler indépendamment l'expérience. Cette autre personne, Schmeidler en l'occurrence, connaîtra le code au moyen d'allusions et de sous-entendus concernant des faits connus seulement de l'agent et du percipient. Schmeidler compare ensuite la liste écrite des divinations du percipient avec sa propre liste mentale (fournie par l'agent), en s'abstenant d'écrire quoi que ce soit en regard de chacun des résultats de la première liste : elle se contente d'écrire le nombre global de coïncidences. (Journal of Parapsychology, 1946, 10).
Commentaire : L'expérience, réussie, n'autorisait pas pour autant une interprétation univoque. L'agent pouvait en effet avoir effectué une clairvoyance prémonitoire (plus précisément, une auto-prémonition télépathique, selon notre modèle) de la liste écrite du percipient, et choisir ensuite un code adéquat. Pour détails, consulter idem.
Un aspect intéressant de cette expérience est son caractère conditionnel postérieur, incompatible avec le modèle "latent" de l'école américaine et explicite dans le nôtre (déterminisme final de principe et affirmation que seul le présent est réel). Autrement dit, bien qu'une ESP nécessite pour sa production présente un déterminant ultérieur, ce déterminant peut être entretemps empêché de se produire, ce qui implique alors que cette ESP n'aura plus existé.



C. TEST

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QUESTIONS : répondre par OUI ou par NON 1. Certains faits psi sont-ils déjà reproduits automatiquement ? 2. Tous les faits psi seront-ils un jour reproductibles ? 3. Le psi implique-t-il, au moins dans certains cas, une transmission inhabituelle d'informations ? 4. Du point de vue de la parapsychologie, peut-on distinguer entre création et psi ? 5. ...entre action morale et psi ? 8. Le psi est-il toujours paradoxal ? 9. Les plantes produisent-elles (par elles-mêmes) du psi ? 10. La matière dite inanimée produit-elle (par elle-même) du psi ? 11. Les praticiens du psi -voyants, guérisseurs, mages, etc.- font-ils de la parapsychologie ? 12. Le psi est-il toujours, objectivement, improbable a priori ? 13. Des phénomènes peuvent-ils être à la fois réels et imaginaires, objectifs et subjectifs ? 14. Pour le parapsychologue, un miracle peut-il être à la fois vrai et faux ? 17. Le psi contredit-il toujours la causalité ? 22. Les ovnis constituent-ils un phénomène psi ? 23. Peut-on modifier le passé physique ? 28. La psychophysiologie est-elle une branche de la parapsychologie ? 29. Le psi est-il toujours la matérialisation d'une croyance ou d'un désir ? 30. La parapsychologie peut-elle en pratique distinguer entre rêves normal et paranormal ? 31. ...entre souvenir et prémonition ? 32. Le rêve est-il toujours prémonitoire ? 34. La parapsychologie peut-elle être considérée comme une branche de la physique ? 35. La parapsychologie est-elle une science parmi d'autres ? 40. Existe-t-il des différences, justifiées théoriquement, entre télépathie, clairvoyance et prémonition ? 42. Existe-t-il une théorie globale du psi qui soit reconnue par la majorité des parapsychologues ? 43. Une théorie globale du psi peut-elle se passer de finalisme extrinsèque ? 44. Le psi prouve-t-il autre chose que lui-même ?
Voici les réponses justes :

1 : N 2 : N 3 : N 4 : N 5 : N 8 : O 9 : O 10 : O

11 : N 12 : O 13 : O 14 : O 17 : O 22 : O 23 : O 28 : O

29 : O 30 : N 31 : N 32 : O 34 : N 35 : N 40 : N 42 : N

43 : O 44 : N

On trouvera en outre une discussion critique de ce test en annexe.



- Pour ce qui est de la terminologie, on trouvera un historique et des propositions originales dans l'une des deux revues du GERP, Psitt !, 1982, 5 p.13-17 ; 1983, 15 p.6-9 et 16 p.6-8.


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